Le Film du jour n°217 : La vie sexuelle dans une prison de femmes
Titre original : Diario segreto da un carcere femminile.
Un film italien de Rino DI SILVESTRO (1973) avec Anita Strindberg, Eva Czemerys, Jenny Tamburi, Cristina Gajoni, Umberto Raho, Massimo Serato, Franco Fantasia.
Chère lectrice, cher lecteur, ne vous effrayez pas d'un tel titre, car jamais, au grand jamais, le Film du jour ne vous causera d'un film porno de bas étage.
La Vie sexuelle dans une prison de femmes n'est en fait qu'un exemple, parmi bien d'autres, d'un genre cinématographique cher aux amateurs de femmes bafouées, emprisonnées et malmenées par des matons vicieux ou des gardiennes sadiques : j'ai nommé le film de prisons de femmes (WIP, Women in Prison en anglais). Un genre qui n'est pas né avec la vague du cinéma érotique au début des années 1970, loin s'en faut.
Dès les années 1930 tant en Europe qu'aux États-Unis, les actrices se plurent (?) à fréquenter assidûment les maisons de redressement, les geôles, les cachots, les camps, les bagnes et autres prisons malfamées. Dans l'Hexagone, les spectateurs purent ainsi compatir aux malheurs de Corinne Luchaire dans Prison sans barreaux (Moguy, 1937), à la détresse de Renée Saint-Cyr dans Prisons de femmes (Richebé, 1937), ainsi qu'au triste destin de Danièle Delorme dans La Cage aux filles (Cloche, 1949) et Prisons de femmes (Cloche, 1958).
La France a eu également son quota de films de prisons de femmes (il y a longtemps...)
Aux États-Unis, c'est Femmes en cage (1950) - avec la sculpturale Eleanor Parker - qui, le premier, détaille avec minutie l'univers carcéral d'un centre pénitentiaire pour personnes du beau sexe. Pessimiste et sans concession, le film y dénonce un système administratif déshumanisé et corrompu.
Mais ce "message", avec le vent de permissivité qui se met à souffler sur le cinéma à partir de la fin des années 1960, disparaît vite pour laisser place au simple plaisir de rincer l’œil de ces messieurs ! Car, phénomène bizarre autant qu'étrange, ces dames emprisonnées perdent leur soutifs et leurs culottes plus souvent qu'à leur tour...
Un film pour apprécier Pam Grier dans ses œuvres
Outre-Atlantique, c'est la maison de production de Roger Corman qui donne le coup d'envoi à l'invasion, sur le grand écran noir de nos nuits blanches, de matonnes sadiques et lesbiennes, de douches collectives prises sous le regard concupiscent de gardiens libidineux et dégoulinants de sueur, de bagarres échevelées dans la gadoue entre femmes dénudées, de frottis-frotta plus ou moins olé-olé entre prisonnières en détresse...
Tournés tous trois avec la voluptueuse Pam Grier (que Quentin Tarantino remettra au goût du jour en lui donnant le rôle-titre de Jackie Brown en 1997), trois films sont particulièrement représentatifs du genre : The Big Doll House (J. Hill, 1971), Femmes en cage (De Leon, 1971) et The Big Bird Cage (J. Hill, 1972).
Bien entendu, les producteurs italiens, l’œil rivé sur le tiroir-caisse, se précipitent à leur tour sur ce filon bien juteux. Outre La Vie sexuelle dans une prison de femmes, le cinéma transalpin livre des films à l'érotisme et à la violence de plus en plus explicites comme Pénitencier de femmes perverses (Rondi, 1974), Les Évadées du camp d'amour (Mulargia, 1979) et sa suite La Fin des tortionnaires du camp d'amour n°2 (Mulargia, 1979), deux films avec Ajita Wilson, Pénitencier de femmes (Mattei, 1982) et Révolte au pénitencier des filles (Mattei, 1982), tous deux avec Laura Gemser, ou bien encore Prison de femmes en furie (Tarantini, 1984).
Le célébrissime Jesus Franco (voir Deux espionnes avec un petit slip à fleurs) tourne, lui aussi, une dizaine de WIP dont L'Amour dans les prisons de femmes/Les Brûlantes (1968) avec, quand même, des actrices de classe internationale comme Maria Schell (la Gervaise de René Clément) et Mercedes McCambridge (l'ennemie de Joan Crawford dans Johnny Guitare).
C'est au barbu espagnol que l'on doit aussi Quartier de femmes (1972) avec la Française Anne Libert (voir Trois filles nues dans l'ile de Robinson), Les Gardiennes du pénitencier (1975) et Sadomania (1983). (Source : Mad Movies)
Selon le Guide des films de Jean Tulard, "Sadomania est nul, terriblement nul, et le miracle qui fait qu'un navet devient sublime n'a pas lieu".
La vie sexuelle dans une prison de femmes, l'histoire : Pour innocenter son père accusé de trafic de drogue, la tendre et douce Hilda (comment peut-on se prétendre tendre et douce avec un prénom pareil...) doit contacter une jeune femme emprisonnée détentrice de tuyaux que l'on espère non crevés.
Pour ce faire, notre héroïne se laisse volontairement enfermer derrière les barreaux. Quelle erreur ! Ignorant que son papa chéri est déjà passé de vie à trépas, Hilda va découvrir, pour son propre malheur, un monde de brimades et de perversions sexuelles. Le tout commencera par une fouille au corps extrêmement poussée...
Le visage anguleux d'Anita Strindberg
C'est l'actrice d'origine suédoise Anita Strindberg (à ne pas confondre avec la fellinienne Anita Ekberg) qui joue la pauvre Hilda.
Née en 1944, la belle au visage anguleux est surtout connue pour ses prestations dans quelques perles du giallo italien du début des années 70.
Considérée dans ce genre cinématographique précis comme l'égale d'une Edwige Fenech ou d'une Susan Scott (voir La Mort frappe à minuit), Anita Strindberg apparaît pour la première fois sur grand écran en voisine aux mœurs dissolues de Florinda Bolkan dans Carole (1970), le giallo mythique de Lucio Fulci, également connu sous les titres autrement plus parlants du Venin de la peur et des... Salopes vont en enfer.
Anita Strindberg dans Les salopes vont en enfer (Fulci, 1970)
Toujours au rayon giallo, on voit aussi l'actrice dans La Queue du scorpion (1971), un excellent film de Sergio Martino, ainsi que dans La Trancheuse infernale (a.k.a. L'Homme sans mémoire), un film de Duccio Tessari de 1974 où elle se fait occire d'une façon tout à fait charmante.
On pointera également deux autres gialli dans la carrière d'Anita Strindberg, malheureusement inédits en France sur grand écran : Chi l'ha vista morire ? (Lado, 1972, avec George Lazenby qui interprète ailleurs James Bond), "un chef d’œuvre absolu" (dixit la revue Mad Movies), et Il tuo vizio e una stanza chiusa et solo io ne ho la chiave ("Ton vice est une pièce fermée dont moi seul ai la clé" en français... tout un programme...), un film de Sergio Martino de 1972 avec également Edwige Fenech. Dans ce dernier long métrage, les deux sublimes actrices ont une scène de massage réciproque plutôt intime que les coquin(e)s s'empresseront de visionner sur la bande-annonce ci-dessous.
Dans une carrière cinématographique qui couvre seulement une dizaine d'années (de 1971 à 1981), Anita Strindberg aura joué dans une vingtaine de films dont, outre les gialli précédemment cités, des comédies pas fufutes (Obsédé malgré lui, Fulci, 1971), des films érotiques miteux (Au tropique du cancer, Mulargia & Lomi, 1972, Les 1001 plaisirs, Sequi, 1975), des polars urbains (La Rançon de la peur, Lenzi, 1974), un sous-Exorciste (L'Antéchrist, De Martino, 1974) et quelques sexy-comédies à l'italienne.
Sa dernière apparition sur grand écran date de 1981 : aux côtés d'autres sublimes créatures (Silvia Dionisio - voir Une jeune fille nommée Julien - et Laura "l'Emanuelle noire" Gemser), elle est au générique de Murder Obsession du vétéran du cinéma italien Riccardo Freda qui brasse, dans sa dernière livraison pour le cinéma, névrose sexuelle, traumatisme enfantin et pathologie criminelle.