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La piqure de Sal Obscur : Un château en enfer
Publié le
par lefilmdujour
Sydney Pollack, 1969, film sorti en salles le 24 octobre 1969
Drôle de film que ce Château en enfer, réalisé par Sydney Pollack juste avant le célèbre - et excellent - On achève bien les chevaux.
Sur le papier, il s'agit ni plus ni moins d'un film de guerre comme beaucoup d'autres. Un petit groupe de soldats américains, mené par un major borgne (Burt Lancaster), investit un château médiéval et décide de le transformer en place forte afin de freiner la contre-offensive allemande dans les Ardennes durant l'hiver 44-45. A cette occasion, trois fortes personnalités s'affrontent. Purement pragmatique, le major n'a qu'une idée en tête : gagner la guerre quelle que soit la manière et quels que soient les dommages collatéraux. Féru d'art et de peinture, son second (Patrick O'Neal) veut préserver coûte que coûte le château et les trésors qu'il recèle. Pur représentant de sa caste et d'une Europe mise à feu et à sang, le châtelain (Jean-Pierre Aumont) est prêt à toutes les concessions pour sauvegarder ses biens et assurer la perpétuité de sa lignée : offrir au major sa femme (ou sa sœur, ce n'est pas très clair), par exemple, afin qu'il lui fasse un enfant.
Toutefois, Un château en enfer s'écarte rapidement de tout réalisme, le réalisateur multipliant les bizarreries et les détails étranges : dialogues décalés, séquences surréalistes (la Volkswagen qui ne veut pas couler dans les douves), scènes fantasmées, éclairages irréels, etc. Le spectateur nage en plein rêve ou en plein cauchemar et une voix off confirme que l'histoire est relatée a posteriori par l'un des soldats, écrivain de son état et poète à ses heures. Ce soldat s'avérera d'ailleurs le seul survivant de l'aventure et publiera un livre contant ce tragique épisode de la guerre et intitulé justement Castle Keep (le titre original du film).
La vision onirique de Sydney Pollack se veut donc une réflexion sur la guerre, sur l'art, sur l'art de la guerre et les rapports que peut entretenir l'homme avec ces (grands) sujets. Le pari du réalisateur ne tient malheureusement pas la route sur la durée et, à force de digressions pas toujours dignes d'intérêt, l'attention du spectateur a tendance à décrocher au bout d'une heure... avant que les destructions massives de la fin du film ne le réveillent quelque peu.
Ceci dit, l'originalité intrinsèque d'Un château en enfer - et ses magnifiques paysages sous la neige (les premières scènes sont absolument sublimes) - vaut quand même le détour. Pour la petite histoire, on retiendra aussi l'extraordinaire beauté d'Astrid Heeren, l'actrice rare (3 films seulement) qui joue l'épouse du châtelain, le bagout de Peter Falk (qui interprète un soldat américain boulanger dans le civil) et l'apparition de notre Elisabeth Teissier nationale en pensionnaire du bordel local "La reine rouge"...