Le Film du jour n°58 : Tais-toi quand tu parles !
Un film franco-italien de Philippe CLAIR (1981) avec Aldo Maccione, Edwige Fenech, Jacques François, Philippe Nicaud, Philippe Clair...
Déjà évoqué sur ce blog (voir Par où t'es rentré... on t'a pas vu sortir), Philippe Clair est cordialement détesté par la critique cinématographique officielle. Mais "peut-on tout à fait ignorer un cinéaste qui remplit les salles le samedi soir, même si son œuvre est incroyablement stupide et vulgaire", s'interroge le Dictionnaire du cinéma de Jean Tulard... A notre humble avis, les titres de la plupart des films de Philippe Clair méritent déjà tout notre respect...
Né au Maroc en 1930, Philippe Clair réalise son premier film en 1965. Avec Annie Girardot pour héroïne, Déclic et des claques (tout un programme déjà...) reçoit le Prix de l'humour cinématographique cette même année. Durant toute la décennie 70, notre ami enchaîne les comédies populaires pimentées d'humour pied-noir et couronnées par des succès au box-office. C'est lui qui fait débuter les Charlots au cinéma dans La grande java (1970) ("Ces Charlots sont à Charlot ce qu'un joueur de tennis non classé de Romorantin est à Connors ou MacEnroe", écrit Jean Tulard, qui n'est sympa que pour les belles blondes pulpeuses...).
Philippe Clair fit débuter les Charlots dans La grande java (1970) (image : www.cinema-francais.fr)
Richard Anconina fait également ses premiers pas cinématographiques devant la caméra de Philippe Clair qui l'enrôle dans Comment se faire réformer (1978) et qui fera à nouveau appel à lui dans Les réformés se portent bien (1979). La plupart des gros succès d'Aldo Maccione au cinéma, c'est aussi Philippe Clair qui les signe, de La grande maffia (1971) à Si tu vas à Rio, tu meurs (1987), en passant par Tais-toi quand tu parles et Plus beau que moi, tu meurs (1982). Notre homme a même réussi à convaincre Jerry Lewis de tourner dans Par où t'es rentré, on t'a pas vu sortir (1984) ! Selon la légende, le comique américain aurait néanmoins tout fait pour empêcher la diffusion du film sur le territoire US...
Venantino Venantini et Alice Sapritch (en Eva Braun...) dans Le führer en folie (1973) de Philippe Clair (imge : www.toutlecine.com)
Le film le plus "exotique" de Philippe Clair reste cependant Le führer en folie (1973). Galabru y interprète un écrivain (Monsieur Achtung...) parlant de son dernier livre ("Hitler footballeur"...) lors d'une émission TV. Il explique à des téléspectateurs médusés que le football a joué un rôle prépondérant dans le règlement de la Seconde Guerre mondiale... Alice Sapritch en Eva Braun vaut à elle seule le détour !
Tais-toi quand tu parles ! l'histoire : Le pauvre Giacomo (Aldo Maccione) mène une vie médiocre et terne, coincé entre une mère abusive et une malchance chronique. Heureusement, ses songes lui permettent d'échapper à ce quotidien sinistre. Toutes les nuits, Giacomo endosse le costume de James Bond et rêve que la plus belle fille du monde (Edwige Fenech, quand même !) le supplie de l'aimer. Un jour, réalité et imaginaire vont se rejoindre. Pris pour un agent secret, Giacomo le raté va devenir le héros auquel il s'identifiait. Si vous trouvez le rapport avec le titre du film, faites m'en part !
Pas besoin de chauffage d'appoint avec Edwige Fenech !
Reine incontestée de la "sexy-comédie" transalpine, Edwige Fenech est née en Algérie en 1946 d'un père industriel maltais et d'une mère italienne. Dans les années 60, elle traverse la Méditerranée et s'installe avec ses parents dans le chef-lieu des Alpes-Maritimes. A dix-huit ans, elle décroche le titre tant convoité de Miss Nice et fait sa première apparition cinématographique en 1967 dans Toutes folles de lui de Norbert Carbonnaux (aux côtés de Robert Hirsch, Sophie Desmarets et, dans un tout petit rôle, Serge Gainsbourg).
Mais ce sont les Allemands qui tireront réellement parti les premiers de la plastique irréprochable de Mademoiselle Fenech. La belle enchaîne jusqu'en 1970 les comédies teutonnes polissonnes (non, non, ce n'est pas forcément antinomique...) et s'affiche dans Les vierges folichonnes (Zachar, 1968), Oui à l'amour, non à la guerre (Antel, 1968), Les petites chattes sont toutes gourmandes (Zachar, 1969), Les folles nuits de la Bovary (Frott, 1969), etc. Que du bonheur !
Puis, c'est l'Italie qui appelle la jolie Edwige à la rescousse et on la voit jouer, dans un premier temps, les victimes apeurées et déshabillées des gialli : L'île de l'épouvante (Bava, 1970), L'étrange vice de Madame Wardh (Martino, 1970), L'alliance invisible/Toutes les couleurs du vice (Martino, 1971), Les rendez-vous de Satan (Carnimeo, 1972), Nue pour l'assassin (Bianchi, 1975), etc.
Vittorio Gassman et Edwige Fenech dans Je suis photogénique (Risi, 1979) (image : www.toutlecine.com)
La capiteuse méditerranéenne à la poitrine avenante et généreuse triomphera toutefois dans les séries des "Prof", "Toubib" et autres "Flic" qui associent dans un mélange un peu indigeste gros comiques lourdauds, starlettes dénudées et gags bien gras. Les titres s'égrènent avec régularité entre La prof donne des leçons particulières (Cicero, 1974) et La flic à la police des mœurs (Tarantini, 1979) ("Partout où elle passe, elle met le feu", précise judicieusement l'affiche...), en passant par La toubib du régiment (Martucci, 1976), La toubib aux grandes manœuvres (Cicero, 1977), La prof connaît la musique (Tarantini, 1978) ou La toubib prend du galon (Cicero, 1978).
L'une des multiples sexy-comédies à l'italienne avec Edwige Fenech en vedette
Aldo Maccione et Edwige Fenech partagèrent plusieurs fois la même affiche. On les a vus côte à côte, non seulement dans Tais-toi quand tu parles !, mais également dans Lâche-moi les jarretelles ! (Martino, 1977) (c'est la classe d'avoir participé à un tel chef-d’œuvre...), Je suis photogénique (Risi, 1980) et Reste avec nous, on s'tire (Tarantini, 1981).
Retirée des écrans depuis le début des années 80 (à de très rares exceptions près), Edwige Fenech est aujourd'hui productrice TV. A l'instar de Luc Merenda (voir La trancheuse infernale), la (encore) belle a fait une apparition - en prof évidemment - dans Hostel: part II (2007), le film d'horreur d'Eli Roth.