Jerry Lewis (1926-2017)

Publié le par lefilmdujour

L’été 2017 n’aura pas épargné la planète cinéma. Après Martin Landau, Claude Rich, Jeanne Moreau, Sam Shepard et John Heard, c’est un autre poids lourd du grand écran qui nous quitte avec le décès de Jerry Lewis le 20 août 2017 à l’âge de 91 ans.

 

Né en 1926, Jerry Lewis avait formé dès 1946 un duo au music-hall avec le "crooner" Dean Martin. Une association qui durera dix ans et sera à l'affiche d'une quinzaine de films, de Ma bonne amie Irma (Marshall, 1949) au Trouillard du Far-West (Taurog, 1956) en passant par Le soldat récalcitrant (Walker, 1951), La polka des marins (Walker, 1952), Parachutiste malgré lui (Taurog, 1952), Amour, délices et golf (Taurog, 1952) et les deux petits chefs-d’œuvre signés par Frank Tashlin, Artistes et modèles (1955) et Un vrai cinglé de cinéma (1956), le dernier long métrage que les deux loustics tourneront ensemble.

 

Jerry Lewis et Dean Martin dans La polka des marins (Walker, 1952) (image : www.toutlecine.com)

 

A Dean Martin donc, les rôles de chanteur à la voix de velours, à l'œil aguicheur, au sourire qui fait craquer toutes les filles, à Jerry Lewis les emplois de crétin de service, de naïf tête à claques et de "gosse" insupportable aux grimaces outrancières. Le duo fait recette, même si tous ces films, à l'exception de ceux de Tashlin, sont plutôt médiocres.

 

A partir du Délinquant involontaire (McGuire, 1957) où il interprète une sorte d'anti-James Dean, Jerry Lewis se produit en solo devant la caméra de George Marshall (P'tite tête de troufion, 1957; Cramponne-toi Jerry, 1969), de Norman Taurog (Mince de planète, 1960) et, toujours et encore, de Frank Tashlin. Ce dernier dirige Jerry Lewis dans Trois bébés sur les bras (1958), Le kid en kimono (1958), Cendrillon aux grands pieds (1960) et L'increvable Jerry (1962) - avec les célèbres tondeuses à gazon qui dévastent tout sur leur passage -. Et c'est encore Tashlin qui signe Un chef de rayon explosif (1963) et Jerry chez les cinoques (1964).

 

C'est notamment dans Un chef de rayon explosif que le spectateur hilare peut apprécier la fameuse scène de l'aspirateur qui avale tout et n'importe quoi dans un magasin (dont le petit chien et la gaine d'une grosse dame) et celle, tout aussi célèbre, où Lewis mime une secrétaire en train de taper à la machine... (photo ci-dessus). Une scène qui inspirera Michel Leeb.

Certes, les films de Frank Tashlin sont un cran inférieurs à ceux que Jerry Lewis réalise lui-même à la même époque, mais les trois derniers (L'increvable Jerry, Un chef de rayon explosif et Jerry chez les cinoques) sont vraiment très bons et hautement recommandables.

 

Jerry Lewis dans Le tombeur de ces dames (1961)

 

Dès 1960, Lewis est en effet passé lui-même à la réalisation avec Le dingue du palace. S'ensuivent cinq ou six films où l'humoriste, dont les grimaces peuvent parfois être horripilantes, se montre un remarquable inventeur de gags : Le tombeur de ces dames (1961) avec l'inoubliable pension de jeunes filles présentée en coupe comme une maison de poupées, Le zinzin d'Hollywood (1962), Docteur Jerry et Mister Love (1963) où le docteur est un gaffeur introverti et vilain comme un pou, et Mr Hyde un crooner bellâtre qui fait tomber toutes les filles (allusion à Dean Martin ?), Jerry souffre-douleur (1964) et Les tontons farceurs (1965), où l'acteur interprète sept rôles différents.

 

Les films suivants de Jerry Lewis accusent néanmoins une nette baisse de forme (déjà sensible dans Les tontons farceurs) et leur accueil par la critique, notamment française qui a porté l'acteur/réalisateur aux nues, est de plus en plus tiède. Après Trois sur un sofa (1966), Jerry grande gueule (1967), Ya Ya mon général (1970) et One More Time (1970, où il ne joue pas), Jerry Lewis va tenter de mettre en scène un long métrage sur un clown enfermé dans un camp de concentration nazi (The Day the Clown Cried). L'expérience fut tellement traumatisante que le réalisateur ne sortit jamais le film (apparemment, il en existe une seule copie que très peu de gens ont vue), sombra dans la dépression et disparut des écrans pendant une dizaine d'années... Lewis ne repassa derrière la caméra que pour Au boulot Jerry (1980) et T'es fou Jerry (1982), deux œuvres assez pauvres au niveau comique.

 

Jerry Lewis et Robert de Niro dans La valse des pantins (Scorsese, 1982)

 

Dans les années 80 et 90, Jerry Lewis acceptera de repasser quelquefois devant la caméra d'autres réalisateurs et, notamment, celle de Martin Scorsese (La valse des pantins, 1982, avec Robert de Niro) et d'Emir Kusturica (Arizona Dream, 1982, avec Johnny Depp et Faye Dunaway).

 

Jerry Lewis voulut aussi faire l'expérience du cinéma français, lui si apprécié dans l'Hexagone. Mais il tomba (on se demande comment...) dans les rets de deux réalisateurs pas terribles terribles : Michel Gérard (voir le Film du jour n°28) et Philippe Clair (voir le Film du jour n°58). Le résultat: Retenez-moi ou je fais un malheur (1983) et Par où t'es rentré, on t'a pas vu sortir (1984). Seuls points communs des deux films, hormis leur médiocrité insigne et leur niaiserie incommensurable: Jerry Lewis donc, et... Jackie Sardou ! Le naufrage est total...

 

Jerry Lewis, qui lança aux Etats-Unis le concept du téléthon, a eu sept enfants, dont six garçons de sa première épouse avec qui il fut marié de 1944 à 1982, et une fille de sa dernière épouse. En 2006, pour son 80e anniversaire, il avait été élevé par la France au titre de commandeur de la Légion d'honneur. En 2006, il avait publié "Dean et moi: une histoire d'amour", paru chez Flammarion. 

Publié dans Claps de fin

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