Le Film du jour n°214 : Zorro et les trois mousquetaires
Titre original : Zorro e i tre moschettieri
Un film italien de Luigi CAPUANO (1962) avec Gordon Scott, José Greci, Giacomo Rossi-Stuart, Livio Lorenzon, Amina Pirani-Maggi, Maria-Grazia Spina...
Vous rêviez depuis longtemps de la rencontre improbable de Zorro et des Trois mousquetaires ? Eh bien, elle a déjà eu lieu ne vous en déplaise, et c'est aux producteurs italiens qu'on la doit ! Dans les années 1960, le cinéma transalpin n'a en effet jamais été avare de télescopages spatio-temporels entre héros de grande envergure, et ce Zorro et les trois Mousquetaires est l'une des perles de l'époque. La même année (1962), notre vengeur masqué favori s'était d'ailleurs également frotté au costaud Maciste, une figure tutélaire des péplums, dans... Maciste contre Zorro, signé par Umberto Lenzi.
Dans le cinéma italien, Zorro n'a pas peur de se confronter aux héros des péplums
Dans les années 1960, le personnage de Zorro était particulièrement populaire dans les cinémas italien et espagnol (lire aussi La Grande Zorro). Celui qui signe "avec un Z de la pointe de l'épée" apparaît ainsi dans une quinzaine de longs métrages tournés sur les deux péninsules et diffusés dans les salles obscures françaises entre 1962 (Zorro l'intrépide de Luigi Capuano) et 1971 (Zorro, marquis de Navarre de Jean Monty, alias Francesco Montemurro).
Au cours de cette décennie, les spectateurs médusés purent ainsi se délecter des aventures de Zorro le vengeur (Romero-Marchent, 1962), Zorro le rebelle (Pierotti, 1966) et Zorro le renard (Zurli, 1968). Pour celles et ceux qui en redemandaient, il y eut également Le signe de Zorro (Caiano, 1962) avec, dans le rôle-titre, Sean Flynn, le propre fils d'Errol Flynn, L'ombre de Zorro (Romero-Marchent, 1962), Les trois épées de Zorro (Blasco, 1963), Le serment de Zorro (Blasco, 1965), Z comme Zorro (Merino, 1968) et Zorro au service de la reine (Montemurro, 1969)... Manquaient plus à l'appel que Zorro contre Fantômette, Sissi défie Zorro... et Fais gaffe Sarko, Zorro veut ta peau.
Gordon Scott (à gauche) dans Zorro et les trois mousquetaires (image : www.ivid.it)
Zorro et les trois mousquetaires, l'histoire : L'action se passe au XVIIe siècle lors de la guerre entre l'Espagne et la France. Une jeune princesse espagnole, Isabella (José Greci, une actrice vue cette même année 1962 dans Les derniers jours d'Herculanum de Gianfranco Parolini sous le pseudonyme de Susan Paget), est retenue prisonnière par les Français (toujours dans les mauvais coups, ceux-là...). L'infâme Richelieu compte négocier sa libération contre les plans d'une forteresse inexpugnable. A la cour d'Espagne, deux nobles, le comte de Séville et le comte de Teruel, clament haut et fort qu'ils vont délivrer la tendre Isabella. Mais Séville est un traître, tandis que sous les apparences excentriques de Teruel (la grande Zorro encore...) se cache... Zorro (je viens de vous le dire, tsss...). L'immonde Richelieu confie, comme de juste, la garde de la douce Isabella aux Mousquetaires. Mais ceux-ci sont bien ennuyés car Zorro leur est bien plus sympathique que le vil Richelieu... (j'sais pas ce que vous en pensez, mais tout ça m'a l'air fort louche...).
Gordon Scott dans son rôle-fétiche de Tarzan
Et qui c'est qui joue Zorro ? Eh ben c'est un monsieur qui avait l'habitude de soulever les haltères ! En l'occurrence le costaud Gordon Scott, qui tint, aux côtés d'un autre bodybuildé, le célèbre Steve Reeves, le rôle de Remus dans Romulus et Remus (Corbucci, 1961).
Né aux États-Unis en 1926 et décédé en 2007, Gordon Scott (de son vrai nom Gordon Werschkul) est essentiellement connu pour avoir interprété le onzième Tarzan officiel de l'histoire du cinéma (et, pour certains, le meilleur).
Steve Reeves et Gordon Scott dans Romulus et Remus (Corbucci, 1961)
C'est le producteur Sol Lesser qui le repère alors que le jeune homme occupe le rôle de maître-nageur dans un grand hôtel de Las Vegas. Prenant donc la suite de Lex Barker dans le rôle de Tarzan, Gordon Scott fait ses premières armes au cinéma dans Tarzan chez les Soukoulous (Schuster, 1954).
Si le film n'est pas terrible, le tournage donne quand même l'occasion au débutant de fricoter avec l'actrice Vera Miles (actrice qui joue le rôle de la sœur de Janet Leigh dans Psychose de Hitchcock). Les deux tourtereaux se marient en effet en 1954 (pour divorcer en 1959 après la naissance d'un fils en 1957).
L'un des six Tarzan tournés par Gordon Scott
En tout et pour tout, Gordon Scott tournera six Tarzan, et améliorera son jeu au fur et à mesure des films. En 1960, après le tournage de Tarzan le magnifique de Robert Day, Gordon Scott reçoit une proposition d'Italie où les péplums ont la cote et où les montagnes de muscle sont fortement recherchées.
Son premier péplum est donc Romulus et Remus et, du jour au lendemain, il entame une seconde carrière très riche avec deux avantages sur ses confrères culturistes : il est déjà un acteur expérimenté avant d'arriver en Italie, et c'est un vrai costaud doté d'une force herculéenne... Ce qui n'est pas le cas d'autres bodybuildés en jupette des années 1960... Les rôles s'enchaînent donc rapidement.
Il est Maciste dans Maciste contre le fantôme (Gentilomo, 1961) et Le géant à la cour de Kublai Khan (Freda, 1961), Jules César (!) dans Cléopâtre, une reine pour César (Tourjansky, 1962), Goliath dans Goliath et l'hercule noir (Caiano, 1963), Hercule dans Hercule, héros de Babylone (Marcellini, 1963) et Hercule contre Moloch (Ferroni, 1963), Coriolan dans La terreur des gladiateurs (Ferroni, 1964), etc.
Gordon Scott et Jacques Sernas dans Maciste contre le fantôme (Gentilomo, 1961) (image : www.ivid.it)
Gordon Scott s'essaie également au film de cape et d'épée (Zorro et les trois mousquetaires donc et Le Lion de Saint-Marc, Capuano, 1963) et même au western (il est Buffalo Bill dans Buffalo Bill, le héros du Far-West, Costa, 1963). Mais le péplum est apparemment le seul genre qui lui convienne. L'essoufflement du genre lui porte donc un coup fatal.
Gordon Scott essaie bien de se reconvertir dans les petits films d'espionnage (Le Rayon infernal, Baldanello, 1966 ; Le Requin est au parfum, Cerchio, 1966)... mais le cœur n'y est plus et l'année 1966 marquera le terme définitif de la carrière cinématographique de l'acteur. Durant les quarante années qui suivront, difficile de savoir comment vécut Gordon Scott, mais apparemment il bénéficia de la générosité de plusieurs de ses fans... Et il apparaissait régulièrement sur des conventions où il continuait de signer des autographes... et de vendre des couteaux signés Tarzan !