Le Film du jour n°247 : Le quatrième morceau de la femme coupée en trois
Un film français de Laure MARSAC (2006) avec Laure Marsac, Denis Podalydès, Claire Borotra...
Fait suffisamment rare pour être noté, le Film du jour s’attaque à une œuvre contemporaine. Mais l’auteur de ces lignes a une bonne excuse pour ne pas se frotter au cinéma de ces dernières années. Depuis la fin de la décennie 1980, à quelques exceptions près, les titres des longs métrages qui sortent dans les salles françaises n’ont rien pour susciter le début du commencement d’une chronique dans cette rubrique.
Force est de reconnaître qu’aucun producteur ou distributeur hexagonal ne se hasarderait aujourd’hui à miser un kopeck sur une œuvre intitulée Par où t’es rentré, on t’a pas vu sortir, Goldocrack à la conquête de l’Atlantide, J’irai verser du nuoc-mâm sur vos tripes ou SuperNichons contre mafia. Et c’est bien triste… Au lieu de ça, le spectateur doit se farcir Trente-six vues du pic Saint-Loup (Rivette, 2008), Le prestige de la mort (Moullet, 2006), J’aimerai partager le printemps avec quelqu’un (Morder, 2007) ou La frontière de l’aube (Garrel, 2007)… C’est sûr, ça rigole moins !
Le quatrième morceau de la femme coupée en trois est le premier long métrage réalisé par la comédienne Laure Marsac. Un tel titre, ça fait un peu penser à « Ça casse pas trois pattes à un canard ». Mais ce serait mésestimer une œuvre inclassable qui, bien que passée quasi inaperçue, récolta un certain nombre d’éloges à sa sortie. « Dans cette fable en apesanteur sur la beauté et la légitimité de l’étrangeté, une jeune femme qui se croit incomplète découvre avec grâce qu’être plurielle n’empêche pas d’être unique », pouvait-on lire dans le mensuel Première. « Ce séduisant agencement de mots charrie délicatesse et douceur, poésie et jeu, drôlerie et tristesse », écrivait pour sa part le quotidien Le Monde, lors de la diffusion du long métrage de Laure Marsac sur les écrans en mars 2007.
Le quatrième morceau de la femme coupée en trois, l’histoire : La trentaine vive et rêveuse, Louise Coleman n’est pas vraiment adaptée au monde qui l’entoure. Le film retrace trois moments clés de sa vie, articulés autour de sa relation aux voitures : comment elle apprit à conduire, comment elle se retrouva seule sur le parking d’un immense centre commercial de campagne, sans argent, sans téléphone, enfermée à l’extérieur de sa voiture, comment elle replongea alors dans le souvenir des heures de son enfance, où elle roulait avec sa mère, rassurée dans le cocon maternant de la voiture.
Laure Marsac
Née le 18 février 1970 à Paris, Laure Marsac commence à prendre des cours de théâtre à onze ans. Dès son premier film tourné pour le cinéma, elle accède à la célébrité. Aux côtés de Jane Birkin, Andrew Birkin (le frère de Jane dans la vraie vie, mais son mari dans le film…), Maruschka Detmers (l’amante de Jane dans le film) et Philippe Léotard (un homme qui aime Jane), Laure Marsac joue à quatorze ans l’un des cinq personnages principaux de La pirate (1984) de Jacques Doillon, alors compagnon dans la vraie vie de Jane Birkin (oui, je sais, c’est compliqué… mais c’est normal, c’est Doillon…). Un rôle qui lui permet de rafler en 1985 le César du meilleur espoir féminin au nez et à la barbe de Fanny Bastien (pour Pinot simple flic de Gérard Jugnot), Emmanuelle Béart (pour Un amour interdit de Jean-Pierre Dougnac) et Sophie Duez (pour Marche à l’ombre de Michel Blanc).
Maruschka Detmers et Laure Marsac dans La pirate (Doillon, 1984)
Malgré cette notoriété subite, Laure Marsac continue son parcours scolaire, tout en tournant de temps en temps pour le cinéma : Les fous de Bassan (Simoneau, 1986) avec Charlotte Valandrey, une autre révélation de ces années-là, L’homme voilé (Bagdadi, 1987) avec Bernard Giraudeau, Tumultes (Van Effenterre, 1990) avec Bruno Cremer. Après le bac, elle a étudié l’histoire de l’art à la Sorbonne et a suivi parallèlement des cours de théâtre.
C’est donc à l’âge de 20 ans que Laure Marsac monte sur les planches pour la première fois et, pendant deux ans, elle joue au théâtre sous la direction de Roger Planchon. Parallèlement, l’actrice continue sa carrière au cinéma. Dans les années 90, on la croise chez Patrice Chéreau (La reine Margot, 1993), Michel Deville (La divine poursuite, 1996) ou Jacques Rivette (Secret Défense, 1997). Bilingue, Laure Marsac tourne aussi (en petite tenue…) dans les scènes parisiennes d’Entretien avec un vampire (Jordan, 1994) et dans Hit me (1998), le premier long métrage, inédit en France, de Steven Shainberg, futur réalisateur de La secrétaire (1999) et Fur : un portrait imaginaire de Diane Arbus (2006).
Laure Marsac dans les bras d’Antonio Banderas dans Entretien avec un vampire (Jordan, 1994)
Au début des années 2000, Laure Marsac se consacre essentiellement à la télévision… et à sa vie familiale. En 2004, elle réalise un court métrage (Une star internationale) avec Charlotte Gainsbourg et enchaîne sur son premier long métrage, Le quatrième morceau de la femme coupée en trois.
Depuis, l’actrice s’est fait un peu moins rare au cinéma. On l’a vue dans La clef (2006) de Guillaume Nicloux, Mesrine, l’ennemi public numéro un (2007) de Jean-François Richet (journaliste, elle y interviewe Vincent Cassel/Mesrine), La reine des pommes (2009) de Valérie Donzelli et Tête de turc (2009) de Pascal Elbé.
Aux côtés d'Anémone, Charlotte Gainsbourg, Valérie Bonneton,et Noémie Lvovsky, Laure Marsac a fait partie de l'aréopage féminin entourant Vincent Lacoste dans Jacky au royaume des filles (2012) de Riad Sattouf.
En 1993, Laure Marsac a joué dans le clip de Foule sentimentale, la chanson d’Alain Souchon.