Jean-Luc Godard (1930-2022)

Publié le par lefilmdujour

Reconnu comme le chef de file de la Nouvelle vague française grâce à A bout de souffle (1959), considéré comme le manifeste du mouvement, le cinéaste franco-suisse Jean-Luc Godard est décédé le 13 septembre 2022 à l’âge de 91 ans.

Comme ses coreligionnaires Éric Rohmer (1920-2010), François Truffaut (1932-1984), Claude Chabrol et Jacques Rivette, Godard avait commencé comme critique de cinéma et il avait réalisé plusieurs courts métrages avant A bout de souffle. Mais Chabrol avec Le Beau Serge (1957) et Les Cousins (1958), puis Truffaut avec Les Quatre cents coups (1958) avaient avant lui popularisé la Nouvelle vague.

Godard toutefois se distingue par sa volonté de révolutionner le langage cinématographique et d’aborder des sujets d’ordre politique ou sociologique comme il le fait avec Le Petit soldat (1960) – sur la guerre d’Algérie – ou Vivre sa vie (1962) – sur la prostitution, deux films avec Anna Karina, également personnage principal d’Une femme est une femme (1960) qui avait permis à l’actrice de décrocher le prix d’interprétation au festival de Berlin. Anna Karina, qui épouse le cinéaste en 1961, tournera en tout sept films avec Godard.

Aux trois précédents s’ajoutent Bande à part (1964), Pierrot le fou (1965), considéré par beaucoup comme le chef-d’œuvre du réalisateur, Alphaville, une aventure de Lemmy Caution (1965) (Ours d’or au festival de Berlin) et Made in USA (1966), auxquels il convient d’ajouter le sketch Anticipation du film Le Plus vieux métier du monde (1966).

Durant cette période féconde, Jean-Luc Godard tourne aussi Les Carabiniers (1962), critique en règle de la guerre, Le Mépris (1963) avec Brigitte Bardot, Michel Piccoli, Jack Palance et Fritz Lang, Une femme mariée (1964) avec Macha Méril, Masculin féminin (1965), une étude de mœurs sur la jeunesse avec Jean-Pierre Léaud, Chantal Goya et Marlène Jobert, et Deux ou trois choses que je sais d’elle (1966), film qui traite à nouveau de la prostitution avec Marina Vlady.

L’année 1967 marque une césure pour Jean-Luc Godard qui épouse cette année-là Anne Wiazemsky qui joue, dans La Chinoise (1967), une jeune révolutionnaire pro-chinoise et, dans Week-end (1967), un membre du Front de libération de Seine-et-Oise (FLSO) que rencontre le couple de Français moyens interprétés par Mireille Darc et Jean Yanne, tentant de circuler entre embouteillages monstrueux et accidents sanglants.

Week-end se présente en fait comme un autodafé du Godard première période. Pour le cinéaste, les événements de mai 1968 sont l’occasion d'une rupture avec le système cinématographique traditionnel. Le réalisateur, qui signe en 1968 une satire sociale avec les Rolling Stones (One+One), se radicalise politiquement et se marginalise en s’engageant dans un cinéma politique avec Jean-Pierre Gorin dans le cadre du groupe Dziga Vertov. Durant cette période où surnage Tout va bien (1971) avec Yves Montand et Jane Fonda, ses films sont peu ou pas diffusés et, à partir de 1974, Godard expérimente la vidéo avec sa compagne Anne-Marie Miéville et travaille pour la télévision (Six fois deux / Sur et sous la communication, 1976 ; France tour détour deux enfants, 1977).

Le réalisateur revient toutefois à un cinéma plus « commercial » à la fin des années 1970 grâce à des producteurs comme Marin Karmitz ou Alain Sarde. Godard tourne alors Sauve qui peut (la vie) (1979) avec Jacques Dutronc, Isabelle Huppert et Natalie Baye, couronnée par le César du meilleur second rôle féminin en 1981, Passion (1981) avec Isabelle Huppert et Hanna Schygulla, Prénom Carmen (1983), Lion d’or au festival de Venise, avec Maruschka Detmers, Je vous salue Marie (1984), Détective (1985) avec Claude Brasseur, Nathalie Baye et Johnny Halliday, Soigne ta droite (1986) avec les Rita Mitsouko, Jacques Villeret et Dominique Lavanant, Nouvelle vague (1989) avec Alain Delon, Hélas pour moi (1992) avec Gérard Depardieu…

A partir de la fin des années 1980, Jean-Luc Godard se consacre à une série de films-essais intitulée Histoire(s) du cinéma (1988-1998) et poursuit son travail au cinéma avec des œuvres souvent ignorées ou boudées par le public comme JLG JLG (1994), For Ever Mozart (1996), Éloge de l’amour (1999), Notre musique (2003), Film socialisme (2008)…

Adieu au langage (2012) se voit décerné le prix du jury au festival de Cannes et Godard, après avoir eu neuf films en sélection officielle à Cannes, reçoit finalement une Palme d’or spéciale en 2018 pour Le Livre d’image, présenté comme un film collage, ainsi que pour toute son œuvre.

A noter que Jean-Luc Godard a été incarné au cinéma par Louis Garrel dans Le Redoutable (2016), réalisé par Michel Hazanavicius et adaptation de l’ouvrage Un an après d’Anne Wiazemsky, publié en 2015. (C'est Stacy Martin qui interprète le rôle de cette dernière.)

Biblio : Dictionnaire de la Nouvelle vague, Noël Simsolo, éditions Flammarion

Publié dans Claps de fin

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