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La piqure de Sal Obscur : Le locataire
Publié le
par lefilmdujour
Roman Polanski, 1976, film sorti en salles le 26 mai 1976
Premier film tourné par Roman Polanski en France, Le locataire, remarquable sur bien des aspects, n'est pas facile à cerner. Chronique d'une schizophrénie paranoïaque ? Description d'un complot contre un fonctionnaire français d'origine étrangère ? Rêve morbide d'une mourante ? Le réalisateur sème des indices plus ou moins contradictoires tout au long de son film et laisse au spectateur le soin de donner un sens à l’œuvre.
Adaptation d'un roman de Topor, Le locataire suit les pas d'un dénommé Trelkovsky, un petit bonhomme timide et complexé joué par Polanski lui-même. En quête d'un appartement à louer, il emménage dans un studio meublé dont l'ancienne locataire s'est jetée par la fenêtre. Rapidement, notre "héros" (appelons-le comme ça malgré le peu d'empathie que le spectateur peut ressentir pour lui) se trouve en butte à l'hostilité des autres habitants de l'immeuble.
Malgré le soutien de Stella (Isabelle Adjani), une amie de la suicidée rencontrée à l'hôpital au chevet de la mourante, Trelkovsky va irrésistiblement tomber dans la schizophrénie et la paranoïa. Seul dans son appartement à l'aspect particulièrement anxiogène, en proie à ce qui ressemble à des hallucinations incontrôlables, il se comporte de plus en plus comme l'ancienne locataire, n'hésitant pas à revêtir les propres vêtements de la morte.
Roman Polanski multiplie les détails qui accentuent la paranoïa de son héros : bruits de voisinage, apparitions mystérieuses, regards étranges, faits inexplicables, etc. Les trognes des acteurs choisis par le réalisateur participent aussi à l'étrangeté de l'environnement cernant le pauvre Trelkovsky. Polanski mêle ainsi de "vieilles" vedettes hollywoodiennes (Melvyn Douglas, Jo Van Fleet, Shelley Winters, inénarrable en concierge aux cheveux gras mouillés et aux socquettes flasques) à des acteurs français à "gueules" (Claude Piéplu, Bernard Fresson, Florence Blot, Jacques Monod). Il y saupoudre aussi la jeunesse pas franchement sexy d'une troupe du Splendid pas encore "bronzée" (Gérard Jugnot, Josiane Balasko, Michel Blanc).
Entièrement construit en studio, l'immeuble où loge Trelkovsky (avec ses fenêtres comme autant de yeux scrutant les faits et gestes du héros) ajoute encore à la sensation d'étouffement et d'enfermement ressentie par le personnage principal (et le spectateur).
Se bouclant sur lui-même à la manière d'un ruban de Möbius, Le locataire est un petit bijou d'étrangeté et l'un des meilleurs films de Polanski.