Le Film du jour n°44 : Dieu les crée... moi, je les tue !
Titre original : Dio li crea... io li ammazzo!
Un film italien de Paolo BIANCHINI (1967) avec Dean Reed, Piero Lulli, Peter Martell, Ivano Staccioli...
Dieu les crée, moi je les tue ! (voilà qui pourrait constituer un programme électoral aux tendances extrémistes destiné à éradiquer à jamais tous les problèmes de la société...) est un film typique de la grande époque du western-spaghetti, comprise grosso modo entre 1966 et 1969. Son titre n'est pas sans rappeler un autre long métrage sorti sur les écrans la même année, Dieu pardonne, moi pas ! de Giuseppe Colizzi, avec le tandem formé de Bud Spencer et de Terence Hill.
Pour une poignée de dollars (Leone, 1964), coup d'envoi officiel du western à l'italienne
En fait, c'est en 1964 que démarre "officiellement" le genre du western à l'italienne, avec la sortie sur les écrans de Pour une poignée de dollars. Tourné en Espagne, ce petit film à bon marché est signé Bob Robertson (le pseudonyme de Sergio Leone) et a pour principale vedette Clint Eastwood, un acteur alors connu des seuls téléspectateurs américains.
Pour une poignée de dollars remporte un tel succès que le Far West envahit aussitôt les écrans transalpins. En dix ans, pas moins de 400 westerns seront ainsi mis en boîte par des réalisateurs italiens. A noter qu'en général, ce Far West factice est reconstitué de toutes pièces de l'autre côté des... Pyrénées ! Le cinéaste espagnol Alex de la Iglesia a d'ailleurs rendu hommage au western-spaghetti en 2002 dans 800 balles en tournant justement à Almeria dans le sud de la péninsule ibérique.
Django, une figure incontournable du western à l'italienne
Le western italien se distingue de son grand frère hollywoodien par sa propension à se focaliser, tout du moins dans les premiers temps, sur des personnages solitaires, cyniques, impitoyables et souvent crasseux, à l'instar des Ringo, Django, Sabata et autres Sartana. Trinita, lui, se classe un peu à part, puisque ce "héros", apparu en 1969 et interprété initialement par Terence Hill, est une figure du western-spaghetti comique, sous-catégorie qui entraînera le déclin du genre tout entier (lire Les anges mangent aussi des fayots).
Dieu les crée, moi je les tue, l'histoire : Un jeune dandy débarque à Wells City. Il est immédiatement embauché par les notables de la ville pour tirer au clair une sombre histoire de pillage de banque. Notre homme ne semble pas presser de se mettre au boulot : il sifflote, se promène, fait la cour à ces dames... Mais, ça y est, ça le prend tout d'un coup et le pied-tendre décide de nettoyer la ville au karcher. Les méchants iront donc tous manger les pissenlits par la racine... et même le méchant en chef, qui fait partie des notables et que le parfait petit cinéphile aura reconnu dès le début, tellement il est moche...
Dean Reed
Étrange destinée que celle de Dean Reed, qui interprète le rôle principal de Dieu les crée, moi je les tue ! Né en 1938 à Denver dans le Colorado, ce blondinet beau gosse, propre sur lui, commence une carrière de chanteur à la fin des années cinquante. Il signe à cette époque un contrat avec Capitol Records et enregistre plusieurs titres.
Le tube "Our summer romance" devient un tel succès en Amérique du Sud (où il détrône même Elvis Presley dans le cœur des Sud-Américains) qu'il entame une tournée en Argentine, au Chili et au Pérou. C'est à ce moment-là qu'il se découvre une "conscience sociale" (comme on dit pudiquement) et que le chanteur de ces dames s'engage très nettement à gauche (manifestations contre les essais nucléaires américains, participations aux conférences pour la Paix, engagements contre la guerre du Vietnam, etc.). En 1966, Dean Reed fait même une tournée en Union soviétique où il devient, là-bas aussi, une méga-star. On le surnomme alors "l'Elvis rouge".
Dean Reed en cow-boy à l'époque du western à l'italienne (image : www.78s.ch)
Parallèlement, Dean Reed fait l'acteur, d'abord en Amérique du Sud, puis en Europe où on l'embauche dans des westerns-spaghettis. Il figure ainsi aux génériques de Buckaroo ne pardonne pas (Bianchi, 1967), Dieu les crée, moi je les tue ! et Adios Sabata (Parolini, 1970). On le voit aussi en 1969 aux côtés de Fabio Testi et d'Anita Ekberg dans La mort sonne toujours deux fois (Philipp)... comme le facteur. Dean Reed passe lui-même à la réalisation en 1970 avec Les pirates de l'île verte.
Mais, en 1973, coup de théâtre, notre homme part s'installer en RDA (faut avouer qu'on peut difficilement faire plus à gauche à l'époque !). Chez l'ami Honecker, il n'en continue pas moins de tourner des films en tant qu'acteur ou réalisateur. En 1986, nouveau coup de théâtre... puisqu'on le retrouve noyé dans un lac de Berlin-Est ! Suicide, accident, assassinat ? Personne ne l'a jamais vraiment su. Toujours est-il que Dean Reed avait exprimé quelques semaines auparavant son désir de retourner aux États-Unis et d'aucuns supposèrent que le KGB n'était pas étranger à l'affaire... D'autant que la rumeur laisse entendre que Dean Reed aurait été un agent de la CIA !
Pour tout savoir sur Dean Reed, prière de consulter le site www.deanreed.de. Seul petit problème, c'est en allemand ! Et voici l'homme poussant la chansonnette à Moscou en 1985 :