Le Film du jour n°79 : Pardon... vous êtes normal ?
Titre original : Scusi, lei e normale ?
Un film italien de Umberto LENZI (1979) avec Ray Lovelock, Enzo Cerusico, Renzo Montagnani, Aldo Maccione, Anna-Maria Rizzoli...
Avec ses soixante-dix films au compteur, Umberto Lenzi, le réalisateur de Pardon, vous êtes normal ?, est un vrai touche-à-tout du cinéma italien. Mais s'il a effectivement tâté de pratiquement tous les genres possibles et imaginables, il l'a souvent fait sans réelle originalité. Pour résumer, Umberto Lenzi, qui a signé certains de ses films sous les pseudonymes de Hank Milestone ou de Humphrey Humbert, est un suiveur prolifique.
Né en 1931 et décédé en 2017, Umberto Lenzi passe à la mise en scène en s'attaquant à des films d'aventure ou de cape et d'épée. Après Marie la rousse, femme pirate (1961), notre homme enchaîne sans sourciller Catherine de Russie (1962), Le triomphe de Robin des Bois (1963) et Sandokan, le tigre de Bornéo (1963). Pour ce dernier long métrage, il fait appel au culturiste Steve Reeves qu'il retrouvera un an plus tard dans Les pirates de Malaisie (1964).
Puis, le réalisateur se lance dans le péplum avec Maciste contre Zorro (1964) qui, malgré son titre improbable, s'avère tristement banal ("Pourquoi pas Maciste contre Frankenstein, Tyson ou Mitterrand ?", s'interroge Jean Tulard dans son Guide des films). Péplum encore avec le bien meilleur Hercule contre les mercenaires (1965). Puis, quand James Bond crève l'écran, Umberto Lenzi embraye sur les films d'espionnage en signant Suspense au Caire pour A 008 (1965) et Super 7 appelle le Sphinx (1966).
Steve Reeves dans Sandokan, le tigre de Bornéo (1963), film d'aventures signé par Umberto Lenzi (image : www.toutlecine.com)
Le western-spaghetti jette ses dernières flammes ? Qu'à cela ne tienne ! Après un film de guerre très correct (Les chiens verts du désert, 1967) et une bonne adaptation de "fumetti" (Kriminal, 1967) (les fumetti sont des BD italiennes pour adultes), notre ami livre en 1968 Gringo joue et gagne puis La malle de San Antonio. Dario Argento et Mario Bava lancent la mode du giallo ? Pas de problème ! Umberto Lenzi sait faire. Il met en boîte le triptyque devenu désormais culte Orgasmo (1969), Paranoïa (1970) et Spasmo (1974) et signe, toujours dans le même genre, Si douces, si perverses (1969) et Le tueur à l'orchidée (1972).
Un giallo signé Umberto Lenzi avec l'américaine Carroll Baker, la Baby Doll d'Elia Kazan
Par contre, et c'est tout à son honneur, c'est Umberto Lenzi qui lance la vogue du cannibalisme cinématographique avec Au pays de l'exorcisme (1972), connu aussi sous les appellations Cannibalis et Le pays du sexe sauvage (vous ne voyez pas le rapport entre les titres ? Ne vous inquiétez pas, c'est normal...). Certes, le film n'est pas très gore - les sauvages ont les aisselles rasés, c'est tout dire ! -, mais Umberto Lenzi se rattrapera ultérieurement avec Cannibal Ferox (1980)... interdit dans 31 pays (selon le Livre des records). Faut dire qu'il avait été, entre temps, largement dépassé par les atrocités filmées par Ruggero Deodato dans Le dernier monde cannibale (1977), puis dans Cannibal Holocaust (1980).
Les cannibales vous souhaitent bon appétit dans Cannibal Ferox (1980) d'Umberto Lenzi (image : www.toutlecine.com)
Lenzi a également filmé des polars à l'italienne. Pour les spécialistes, c'est d'ailleurs dans ce genre qu'il a produit ses meilleures œuvres. On lui doit ainsi La rançon de la peur (1974), film hyperviolent et pessimiste avec l'acteur Tomas Milian en dangereux psychopathe, drogué et névrosé. Toujours dans le même genre, Tomas Milian repasse devant la caméra du metteur en scène italien dans Bracelets de sang (1975), Brigade spéciale (1975), Le clan des pourris (1976), Le cynique, l'infâme, le violent (1977) et Échec au gang (1977).
Avec L'avion de l'apocalypse (1981), Umberto Lenzi paya aussi son écot au film de zombies - pas très frais en l'occurrence - et, avec La guerre du fer (1982), il livra un long métrage à mi-chemin entre Conan le barbare et La guerre du feu.
La rançon de la peur (1974), second des nombreux néo-polars à l'italienne réalisés par Umberto Lenzi
Pardon, vous êtes normal ? l'histoire : Franco est gay. Son ami "Nicole" est travesti. L'oncle de Franco est un juge sévère qui pourfend les mœurs relâchées de ses concitoyens. Lorsque son neveu fait la connaissance d'Anna lors d'un marathon de danse et que Nicole simule un suicide, l'affaire va se compliquer.
Le héros de Pardon, vous êtes normal ? est interprété par Ray Lovelock, né en 1950 d'une mère italienne et d'un père anglais et décédé en 2017. Blondinet à la bonne bouille, Ray Lovelock fait ses débuts au cinéma dans Tire encore si tu peux (1967), le western culte, mais morbide, de Giulio Questi, un film déjà évoqué ici (voir La mort a pondu un œuf). L'acteur novice y joue le rôle du jeune fils du shérif qui éprouve de tendres sentiments pour le héros du film (Tomas Milian). Violé par une bande de soudards, il finira par se suicider...
Ray Lovelock, 17 ans, dans le western Tire encore si tu peux (Questi, 1967)
Ray Lovelock enchaîne avec plusieurs polars à l'italienne comme Bandits à Milan (Lizani, 1967), Opération fric (Lupo, 1968) ou La rançon de la peur (1974) d'Umberto Lenzi. Ce dernier réalisateur fait régulièrement appel à lui puisque l'acteur apparaît aussi dans Meurtre par intérim (1971), La grande bataille (1977) et De l'enfer à la victoire (1978), trois films signés par notre réalisateur du jour.
Ray Lovelock et Mimsy Farmer dans Frissons d'horreur (Crispino, 1975) (image : www.toutlecine.com)
Ray Lovelock se promène aussi dans plusieurs bandes fantastiques et films d'horreur de bonne facture comme Les sorcières du bord du lac (Cervi, 1971), Le massacre des morts-vivants (Grau, 1974), Frissons d'horreur (Crispino, 1975) et Terreur (a.k.a. La dernière maison sur la plage) (Prosperi, 1978), long métrage où il n'hésite pas à jouer les mauvais garçons cachant une âme perverse derrière une belle gueule.
L'acteur tient d'ailleurs un rôle assez semblable dans Avoir vingt ans (1978) de Fernando di Leo. Ray Lovelock est également au générique de l'assez mauvais giallo SlashDance/Murderock (1984) de Lucio Fulci. Dans ce dernier long métrage, il croise Olga Karlatos, actrice passée à la prospérité pour s'être mangé une écharde dans l’œil en gros plan dans L'enfer des zombies (1979) du même Lucio Fulci.
Ray Lovelock et Marc Porel dans le polar Uomini si nasce poliziotti si muore (Deodato, 1976)
Ray Lovelock s'est peu risqué hors du cinéma transalpin. On l'a néanmoins vu dans Un violon sur le toit (Jewison, 1971), version filmée de la célèbre comédie musicale, ainsi que dans le film catastrophe Le pont de Cassandra (Pan Cosmatos, 1976), au milieu d'un aréopage de stars internationales plus ou moins sur le retour (Sophia Loren, Ingrid Thulin, Ava Gardner, Burt Lancaster, etc.).
A partir de la fin des années 80, Ray Lovelock, toujours bien fait de sa personne à 60 ans, avait enchaîné téléfilms et séries TV à la télévision italienne où son succès ne se démentait pas.