Le Film du jour n°74 : Les SS étaient là, les Gretchen aussi !

Publié le par lefilmdujour

Titre original : Ilsa, she wolf of the SS

Un film canadien de Don EDMONDS (1974) avec Dyanne Thorne, Gregory Knoph, Tony Mumolo, Maria Marx, Jo Jo Deville...

Connu également sous le titre Ilsa, la louve des SS (traduction exacte du titre original...), le Film du jour est l'un des fleurons d'un genre cinématographique légèrement crapoteux que nous nous sommes gardés d'évoquer jusqu'ici et que le spectateur féru de cinéma bis connaît sous les noms de "svastika-pornos", "erosvastikas" ou bien encore "gestaporns".

Il s'agit en quelque sorte de films de "prisons de femmes" à connotation érotique (voir La fin des tortionnaires du camp d'amour n°2) transposés dans l'univers concentrationnaire. Mais, attention, même si on peut condamner ce genre de films, il ne faut pas nécessairement y voir une quelconque idolâtrie de la barbarie nazie. Comme l'écrit le magazine Mad Movies, il ne s'agit que de "fantasmes d'opérettes, proches des bandes dessinées SM américaines et flanqués d'une esthétique grand-guignolesque".

L'un des multiples exemples de films de "nazisploitation" produits dans les années 70 par la firme Eurociné

Entre 1973 et 1977 se sont ainsi multipliées les bandes américaines, françaises, italiennes où se mélangent allègrement filles plus ou moins nues, nazi(e)s plus ou moins sadiques, barbelés plus ou moins factices et tortures plus ou moins raffinées. Citons pêle-mêle :

- Camp spécial numéro 7 (1973) de Lee Frost (le réalisateur de Cache ta femme, prends ton fusil, voici les Scavengers),

- Erika, les derniers jours des SS/Erika, fille SS/Erika, la plus sadique des kapos (Batzella, 1977) (eh oui, à chaque fois que ça ressort, ça change de nom, histoire de tromper le chaland !),

- Hôtel du plaisir pour SS/La maison privée des SS/Maison pour SS (Mattei alias Matthews, 1976),

- Train spécial pour Hitler/Train spécial pour SS (Payet alias Gartner, 1976),

- Elsa, Fraülein SS/Poupées nazies (Rohmm alias Staar, 1977),

- Nathalie, rescapée de l'enfer/Nathalie dans l'enfer nazi (Payet, 1977),

- Helga, la louve de Stilberg (Payet alias Gartner, 1978),

- Roses rouges pour le führer/L'enfer des femmes/Des roses pour le führer (Garrone, 1977),

- Fraülein SS/Destins de femmes (Caiano alias Hawkins, 1977),

- Des filles pour le bourreau/Les orgies du 3e Reich (Canevari, 1976),

- Holocauste nazi/Les armes secrètes du 3e Reich (Batzella, 1976), etc.

Au-dessus de ce salmigondis, on placera Salon Kitty (1976) de Tinto Brass, futur réalisateur des fameux Caligula (1979) et La clé (1983). N'oublions pas non plus que ce genre cinématographique douteux possède aussi son versant intello avec Portier de nuit (Cavani, 1973), film où s'affrontaient dans des rapports sadomasochistes un ancien officier SS (Dirk Bogarde) et une déportée (Charlotte Rampling).

Portier de nuit (Cavani, 1973), le versant intello du genre (image: www.web-libre.org)

Les SS étaient là, les Gretchen aussi, l'histoire : le film est le premier opus d'une trilogie qui compte les "exploits" d'une blonde imposante à forte poitrine et irrécupérablement sadique, répondant au doux nom d'Ilsa (et interprétée par Dyanne Thorne).

Notre teutonne tatillonne sur le règlement est chef-doctoresse des Veuves noires du 3e Reich et soumet les prisonniers d'un camp à de très mauvais traitements (et encore je suis loin du compte...). Selon Cinéma bis, 50 ans de cinéma de quartier (Laurent Aknin), "le film mélange sexe et tortures de manière extrême et gratuite, mais cet excès même, renforcé par le physique et le jeu outré de Dyanne Thorne, le renvoie avant tout du côté des bandes dessinées pour adultes". Ce qui rejoint le commentaire de Mad Movies cité plus haut.

Voilà par ailleurs ce qu'en dit la cinémathèque de Toulouse qui projeta le long métrage en mai 2004 : "Le film réussit le difficile pari, malgré les dérapages voyeuristes qui le menaçaient, de transposer les codes du cinéma bis érotico-violent au sein même de la barbarie". Et le responsable de la programmation d'ajouter : "Observez bien Ilsa et vous apercevrez peut-être, par-delà son masque blafard et déjà fatigué, l'un des plus grands traumatismes du XXe siècle". Mais où a-t-il été chercher tout ça ?

Vous pouvez visionner (à vos risques et périls, le Film du jour déclinant toute responsabilité) la bande-annonce des SS étaient là, les Gretchen aussi ici.

Dyanne Thorne

A plus de 40 ans, Dyanne Thorne a trouvé en Ilsa, la matonne SS sadique, LE rôle de sa vie. Née en 1932 et dotée de deux arguments pneumatiques de premier choix, la demoiselle, passée quand même par l'Actors' Studio de Lee Strasberg, avait jusque là galéré entre pièces de théâtre, séries TV et quelques films érotiques et d'horreur fauchés (on notera notamment une apparition de notre blonde platine distendue du bustier dans Les aventures érotiques de Pinocchio de Corey Allen en 1971, apparition qui ne laisse pas de bois le fameux pantin !).

Par trois fois, Mademoiselle Thorne interpréta le personnage d'Ilsa. Les SS étaient là, les Gretchen aussi (Edmonds, 1973) fut suivi par Ilsa, gardienne de harem (Edmonds, 1975) et par Ilsa, la tigresse du goulag (Lafleur, 1977). Du nazisme au stalinisme, il n'y a qu'un pas pour Frau Doktor Ilsa ! Si l'actrice accéda ainsi à la célébrité internationale, la médaille eut son revers, car elle se vit définitivement grillée auprès des professionnels de la profession (et, dommage collatéral, son mari de l'époque, qui était juif, la battit froid...).

Dyanne Thorne dans ses œuvres... (image: www.sleazoidexpress.com)

Oui, mais c'était sans compter sur Jesus Franco. Vous souriez déjà de contentement, j'en suis sûr ; ça faisait trop longtemps que le Film du jour ne vous avait pas parlé de lui, hein ! Charitable, notre ami la fait jouer en 1977 dans... une pâle imitation des films précédents intitulée poétiquement Pénitencier des femmes perverses et également connue sous les noms de... Greta la tortionnaire et Ilsa, ultimes perversions... Dyanne Thorne ne s'en releva pas et raccrocha définitivement l'uniforme, la badine et le fouet.

Dans les années 80, notre amie se reconvertit dans l'organisation de spectacles à Las Vegas. Depuis, elle a trouvé la foi et créé sa propre chapelle baptisée « Cercle international de la prière par la science et l’esprit ». Dyanne et son mari font aussi dans le mariage à la chaîne… Décidément, les voies du Seigneur sont impénétrables !

Un hommage à Dyanne Thorne a été rendu en 2006 par Quentin Tarantino et Robert Rodriguez. Parmi les (fausses) bandes-annonces qui accompagnèrent la sortie américaine de leur diptyque Boulevard de la mort/Planète terreur, hommage au cinéma d’exploitation des années 70 et 80, on pouvait admirer celle de Werewolf Women of the SS, gloubiboulga décomplexé mixant loups-garous, savants nazis fous et pépées blondes sexys engoncées dans des uniformes SS, en une sorte de réminiscence des « erosvastikas » des années 70. Ci-dessous, cette bande-annonce pas à piquer des hannetons réalisée par Rob Zombie !

Publié dans Titres débiles

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