Le Film du jour n°17 : La mort a pondu un œuf

Publié le par lefilmdujour

Titre original: La morte ha fatto l’uovo

Un film italien de Giulio QUESTI (1967) avec Jean-Louis Trintignant, Gina Lollobrigida, Ewa Aulin, Jean Sobieski...

A l'instar de Mais... qu'avez-vous fait à Solange ? La mort a pondu un œuf est un giallo, film policier italien aux meurtres stylisés et baroques. Pourquoi giallo, au fait... Parce que ce terme, qui désignait initialement une collection de romans policiers populaires à la couverture jaune (giallo en italien), a naturellement été appliqué au genre cinématographique qui s'en est inspiré.

Mario Bava, avec La fille qui en savait trop (1962), Six femmes pour l'assassin (1964), voire La baie sanglante (1971) (quoiqu'on soit là plus près du slasher avec pas moins de quinze meurtres aussi atroces que sublimes), est l'un des deux metteurs en scène qui ont porté le giallo au panthéon du cinéma, l'autre étant Dario Argento, avec L'oiseau au plumage de cristal (1969), Le chat à neuf queues (1970), Quatre mouches de velours gris (1971), et, surtout, Les frissons de l'angoisse (1974), le chef-d'œuvre ultime du genre.

David Hemmings dans Les frissons de l'angoisse (1974), un chef-d'œuvre du giallo signé Dario Argento (image : www.toutlecine.com)

Né en 1924 et décédé en 2014, Giulio Questi, pour sa part, n'a réalisé que trois longs métrages de fiction pour le cinéma. Mais ces trois œuvres se démarquent de la production courante par leur caractère iconoclaste qui a beaucoup choqué le public à leur sortie. Selon Mad Movies, "les travaux de Questi ont anticipé de plusieurs années, dans le domaine de l'horreur cérébrale, les audaces cinématographiques de réalisateurs cultes tels qu'Alejandro Jodorowsky, Werner Herzog ou David Lynch". Pas moins !

Outre La mort a pondu un œuf, giallo quasi expérimental à la mise en scène avant-gardiste, Giulio Questi a signé Tire encore si tu peux, western de 1967 qui transgresse pas mal de tabous de l'époque (dont l'homosexualité, trente ans avant Brokeback Mountain), et Arcana (1972), film de sorcières psychédélique avec Lucia Bose.

Tire encore si tu peux (1967), seul western, mais quel western ! signé par l'italien Giulio Questi (image : www.1kult.com)

La mort a pondu un œuf, l'histoire : Anna élève des poulets avec son mari Marco. Elle ignore que celui-ci la trompe avec sa nièce Gabrielle. Les deux amants projettent d'éliminer Anna, mais Gabrielle aime en fait un autre homme, qui découvre que Marco est un tueur de prostituées (enfin du piment !).

Ce n'est pas vraiment une surprise de découvrir le Français Jean-Louis Trintignant dans La mort a pondu un œuf. Comme un certain nombre d'acteurs de sa génération (le défunt Philippe Noiret par exemple), Jean-Louis Trintignant a tourné dans de nombreux films italiens et notamment pour Valerio Zurlini (le superbe Eté violent, 1959, avec la sublime Eleonora Rossi Drago), Dino Risi (Le fanfaron, 1962, avec Vittorio Gassman), Sergio Corbucci (le western Le grand silence, 1967, avec Klaus Kinski), Bernardo Bertolucci (Le conformiste, 1970, avec Stefania Sandrelli et Dominique Sanda), Luigi Comencini (La femme du dimanche, 1975, avec Marcello Mastroianni), Ettore Scola (La terrasse, 1980), et même le sulfureux Tinto Brass (En cinquième vitesse, a.k.a. Le cœur aux lèvres, 1967).

Tinto Brass n'est autre que le fameux metteur en scène de Caligula (1979) et de La clé (1983) avec, dans cette dernière œuvre, Stefania Sandrelli et son postérieur (j'en connais qui lisent cette rubrique et qui en gardent un souvenir ému !).

Ewa Aulin

Née en 1950, élue miss Suède junior en 1965 puis propulsée miss Junior international en 1966, Ewa Aulin, Gabrielle dans La mort a pondu un œuf, est surtout connue pour avoir interprété le rôle-titre de Candy (1968). "Pitrerie vaguement érotique" (selon Jean Tulard), le film est signé Christian Marquand, le frère de Nadine Trintignant.

Pour vous faire une idée de l'OVNI, visionnez quelques extraits du film ci-dessous :

Aux côtés de Charles Aznavour, Marlon Brando, Richard Burton, James Coburn, Ringo Starr, Ray Sugar Robinson, Walter Matthau et John Huston (un casting de fou !), Ewa Aulin y interprète une jeune et jolie étudiante enlevée par un poète, puis violée par un Mexicain, par un militaire dans une forteresse volante, et enfin par un chirurgien, avant de connaître les caresses d'un cinéaste new-yorkais, d'un gangster bossu, d'un gourou et, pour terminer, de son propre père...
On comprend sans mal que la jeune actrice de 17 ans ait sombré dans la dépression nerveuse après le tournage du film... Candy ayant fait un flop retentissant aux États-Unis, la carrière hollywoodienne de la belle blonde fut enterrée avant même d'avoir débuté... La prestation de la jeune fille lui avait pourtant valu une nomination au Golden Globe du meilleur espoir féminin.

Walter Matthau et Ewa Aulin dans Candy (Marquand, 1968), seule œuvre "marquante" de la jeune actrice suédoise au cinéma (image : www.toutlecine.com)

A noter qu'Ewa Aulin avait déjà partagé l'affiche du giallo En cinquième vitesse de Tinto Brass avec Jean-Louis Trintignant, avant de tourner dans La mort a pondu un œuf. Dans la filmographie relativement succincte d'Ewa Aulin (sa carrière au cinéma s'étend de 1965 à 1973), on retiendra aussi sa participation à la comédie américaine Commencez la révolution sans nous (Yorkin, 1969). Au début des années 70, l'actrice fut malheureusement cantonnée aux rôles déshabillés dans de petits films d'horreur et des comédies sexy. On l'aperçoit notamment dans le décamérotique Fiorina (De Sisti, 1972), aux côtés de Klaus Kinski dans La mort a souri à l'assassin (d'Amato, 1973) ainsi que dans Cérémonie sanglante (Grau, 1973), énième variation sur les méfaits de la comtesse Bathory, jouée ici par la magnifique Lucia Bose.

Ewa Aulin a été mariée de 1968 à 1972 au producteur italien Roberto Loyola qui réalisa en 1970, sous le nom de John Shadow, un film obscur avec son épouse en vedette (Microscopic Liquid Subway to Oblivion). Elle se remaria en 1974 et quitta définitivement le monde du cinéma pour devenir enseignante.

Publié dans Titres abscons

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