Le Film du jour n°162 : Ah ! Si papa savait ça !
Titre original : Take her, she's mine !
Un film américain de Henry KOSTER (1963) avec James Stewart, Sandra Dee, Audrey Meadows, Robert Morley, Philippe Forquet, John MacGiver...
Disons-le d'emblée au risque de décevoir certains d'entre vous. Le Film d'aujourd'hui n'a strictement rien à voir avec la chansonnette : "J'ai perdu le do de ma clarinette. Ah ! Si papa savait ça... tra la la. Ah ! Si papa savait ça... tra la la. Il dirait Ohé. Il dirait Ohé"... Ceci étant dit, Ah ! Si papa savait ça, réalisé par le dénommé Henry Koster, n'intéressera que les fans absolus de James Stewart et les amateurs de beautés juvéniles (Sandra Dee, qui joue sa fille dans cette œuvrette, avait tout juste vingt ans lors du tournage).
Réalisateur d'origine allemande obligé de fuir le nazisme en 1936, Henry Koster (1905-1988), de son vrai nom Herman Kosterlitz, est surtout connu pour avoir été le premier cinéaste à tourner un film en Cinémascope. Vague épopée biblique au style saint-sulpicien, La tunique (1953) s'attache à suivre la destinée, ô combien palpitante, du dernier vêtement du Christ. A l'affiche, Richard Burton et Jean Simmons.
Jean Simmons et Richard Burton dans La tunique (1953), premier film en Cinémascope signé Henry Koster (image : www.toutlecine.com)
Et, à part ça ? Rien ou pas grand-chose, car le reste de la filmographie de Henry Koster, qui s'étage de 1932 à 1965, s'avère d'un intérêt extrêmement limité. Ses comédies, notamment, ne valent pas tripette. "Toutes ces bandes à l'usage des familles exsudent la bêtise, la mièvrerie et le mauvais goût les plus insupportables, en particulier celles de l'horrible Deanna Durbin", écrivent ainsi Jean-Pierre Coursodon et Bertrand Tavernier dans 50 ans de cinéma américain.
Née en 1921, décédée en 2013 et bien oubliée, la pauvre Deanna Durbin fut quand même à 21 ans l'actrice la mieux payée au monde (elle était d'ailleurs l'actrice préférée d'Anne Frank qui avait épinglé des photos de la jeune femme dans sa cachette). Également chanteuse, Deanna Durbin débuta aux côtés de Judy Garland dans un court-métrage et fut en effet propulsée vedette de plusieurs films signés Henry Koster. Leurs titres - Trois jeunes filles à la page (1937), Deanna et ses boys (1937), Trois jeunes filles ont grandi (1938), Premier amour (1938), Chanson d'avril (1940) et Eve a commencé (1941) - n'inspirent pas, il est vrai, les élans révolutionnaires et les passions débridées...
Le réalisateur Henry Koster (image : www.nndb.com)
Après-guerre, Henry Koster se spécialisa dans les comédies, les grosses machines historiques et les chroniques oscillant entre l'ultra-sentimental et le sirupeux. Dans la première catégorie, on citera Les sœurs Casse-cou (1949) avec Loretta Young (voir Ma femme est un grand homme), Vive Monsieur le Maire (1949) avec Danny Kaye, M. Belvédère fait sa cure (1951) avec Clifton Webb, ou Mon homme Godfrey (1947) avec June Allyson et David Niven.
Dans la deuxième catégorie, figurent en bonne place Désirée (1954), avec un Marlon Brando mauvais comme un cochon en Napoléon, et Au sixième jour (1956), film sur le Débarquement qui ne tient guère la route face au Jour le plus long (Zanuck, 1963). Côté chroniques sentimentales, le zéro pointé est accordé sans problème à La Maja nue (1959), long métrage détaillant de manière ridicule les amours de Goya avec (pourtant) Ava Gardner. Ajoutons que Harvey (1950), improbable histoire d'un homme dont le compagnon est un lapin géant invisible (que fait la police ?), ne vaut que pour l'interprétation de James Stewart.
James Stewart et son lapin... dans Harvey (1950) de Henry Koster (image : www.toutlecine.com)
Henry Koster terminera sa filmographie sur un pur nanar intitulé Dominique (1965), évocation de la fameuse Sœur Sourire à qui l'on doit le tube interplanétaire "Dominique, nique, nique..." Ici, c'est Debbie Reynolds - bien avant Cécile de France donc - qui enfile la tenue de religieuse et qui pousse la chansonnette ! Tout ça prêterait à rire si la vraie Sœur Sourire n'avait pas, par la suite, pris ses distances avec sa congrégation, été poursuivie par le fisc belge et fini par se suicider en 1985 avec sa compagne...
Dans les films signés par Henry Koster, on sauvera quand même Honni soit qui mal y pense (1948), histoire d'un ange (Cary Grant) descendu sur terre pour prêter main forte à un pasteur et qui en profite pour faire du gringue à sa femme. Idem pour Le seigneur de l'aventure (1955), chronique de la vie de l'aventurier et explorateur Sir Walter Raleigh, favori d'Elizabeth 1ère, formidablement interprétée ici par Bette Davis (qui, soit dit en passant, s'était fait une spécialité des interprétations de la souveraine britannique).
Sandra Dee et James Stewart enlacés en tout bien tout honneur dans Ah ! Si papa savait ça ! (image : www.toutlecine.com)
Ah ! Si papa savait çà ! l'histoire : Frank Michaelson (James Stewart) a une très jolie fille répondant au doux nom de Mollie (Sandra Dee). Mais il se fait bien du souci pour la vertu de sa progéniture (un argument de scénario usé jusqu'à la corde du slip). Pour y poursuivre ses études, Mollie part en Europe (le lieu de perdition par excellence pour les Américains au début des années 60). Quand son papounet apprend que sa fifille pousse la chansonnette dans une boîte de nuit au lieu d'user sa culotte sur les bancs de l'université, son sang ne fait qu'un tour. Il prend l'avion pour la rejoindre. On s'en doute, les quiproquos vont s'enchaîner et on va bien se marrer (ben non, en fait...). Pour le plaisir, je vous ai joint une photo de Sandra Dee entre deux prises sur le tournage de Ah ! Si papa savait ça !
Apparemment, il faisait chaud sur le plateau...
Née en 1942, Sandra Dee, Mollie dans Ah ! Si papa savait ça, posa dès l'enfance pour les magazines, puis enchaîna dans les pubs à la télé. C'est à 14 ans qu'elle montre pour la première fois son joli minois au cinéma. Elle interprète la plus jeune des quatre sœurs dans Femmes coupables (Wise, 1957), ses aînées prenant les traits de Jean Simmons, Joan Fontaine et Piper Laurie. L'année suivante, Sandra Dee est la fille du couple (au cinéma et dans la vie) Rex Harrison/Kay Kendall dans Qu'est-ce que Maman comprend à l'amour ? (Minnelli, 1958).
Mais c'est surtout son interprétation de la fille de Lana Turner dans Mirage de la vie (1959), le chef-d’œuvre de Douglas Sirk, qui rend l'actrice définitivement célèbre. D'autant que la même année, elle endosse le rôle-titre de Gidget (Wendkos, 1959), un film qui fait un tabac outre-Atlantique, et qu'elle figure au générique de Ils n'ont que vingt ans (Daves, 1959), une bluette mélodramatique plébiscitée par les jeunes ados américains.
Sandra Dee et Bobby Darin (image : www.bobbydarin.net)