Le Film du jour n°157 : Deux enfoirés à Saint-Tropez
Un film français de Max PECAS (1985) avec Philippe Caroit, Jean-Michel Noiret, Lillemour Jonsson, Caroline Tresca, Marie Daëms...
Pour les amateurs de ce petit "je ne sais quoi" de poétique qui séduira les plus sensibles et les plus romantiques d'entre vous, le Film du jour s'attarde sur Deux enfoirés à Saint-Tropez, un long métrage ô combien emblématique de la filmographie du regretté Max Pecas (1925-2003).
Avant-dernière œuvre du maître, Deux enfoirés à Saint-Tropez forme le volet central de son triptyque consacré à la station tropézienne, après Les branchés à Saint-Tropez (1983) et avant On se calme et on boit frais à Saint-Tropez (1986). Si vous avez la chance de ne pas connaître ces trois films, rassurez-vous, ils seront comme chaque année programmés sur M6, Comédie, voire Direct8. Peu de chances, par contre, de croiser ces fleurons de l'art cinématographique hexagonal sur Arte...
Jean-Michel Noiret, Philippe Caroit, Caroline Tresca (de dos) et Marie Daëms (au fond) dans Deux enfoirés à Saint-Tropez (image : www.toutlecine.com)
Deux enfoirés à Saint-Tropez, l'histoire : Julius (Philippe Caroit) attend son copain Paul à sa sortie de prison. Peu amène, ce dernier se fâche tout rouge quand Julius lui propose des vacances mirifiques dans le Midi de la France. "La dernière fois que tu m'as parlé de soleil, j'ai fini à l'ombre", assène Paul. On l'aura compris à la lecture de cette phrase sublime ; nous sommes en présence d'un film où les dialogues rivaliseront de finesse et d'à-propos...
Comme de bien entendu, Paul cède et voilà les deux amis roulant sur l'autoroute à bord d'une voiture "empruntée". A une station-service, ils sauvent d'un mauvais pas une auto-stoppeuse pas trop désagréable à regarder, Évelyne (Caroline Tresca), qui les emmène à Saint-Tropez chez sa tantine milliardaire (Marie Daëms). Tandis que les soutiens-gorges iront s'inscrire aux abonnés absents, les quiproquos vont s'enchaîner... en laissant de marbre le cinéphile compulsif, qui a déjà sombré dans le sommeil le plus profond en rêvant de ce qu'aurait pu faire Jean Renoir ou François Truffaut d'un tel sujet... Parce que les lolos à l'air, ça va bien cinq minutes !
Philippe Caroit (image : www.gala.fr)
L'un des deux enfoirés du titre n'est autre que Philippe Caroit, le brun aux yeux bleus que les téléphages frénétiques auront repéré en adjoint de Jean Rochefort dans "Les bœufs-carottes", série TV diffusée au début des années 2000, puis, plus tard dans le rôle de Gilles Sagnac dans "RIS Police scientifique".
Né en 1959, Philippe Caroit s'est lancé corps et âme dans la carrière de comédien lorsque Ariane Mnouchkine lui a proposé d'intégrer le Théâtre du Soleil. C'est avec Eric Rohmer qu'il débute au cinéma dans La femme de l'aviateur (1981) et c'est avec Jean-Claude Brisseau qu'il apparaît pour la première fois sur l'écran TV ("Les ombres", 1982).
Malheureusement, si la carrière à la télévision du beau Philippe est bel et bien lancée, il n'en est pas de même au cinéma. Après un rôle dans Liberty Belle (1983) de Pascal Kané, il échoue rapidement dans le nanar bien craignos en jouant dans Par où t'es rentré, on t'a pas vu sortir (Philippe Clair, 1984), puis en enchaînant sur le désastreux Diesel (Kramer, 1985), film post-apocalyptique à la française avec Gérard Klein en tête d'affiche (le film vaut le coup d’œil rien que pour les coiffures atroces pré-tecktonik du casting).
Sa prestation dans Deux enfoirés à Saint-Tropez est la cerise sur le gâteau. La carrière de Philippe Caroit semble donc condamnée à piétiner sur grand écran... c'est le moins que l'on puisse dire. Ce qui n'est pas bien grave puisque, depuis le milieu des années 80, l'acteur enchaîne sans interruption et avec succès les rôles à la télévision (il a également joué le rôle de Seznec en 2010 dans le spectacle du même nom de Robert Hossein).
Philippe Caroit et Caroline Tresca dans Deux enfoirés à Saint-Tropez (image : www.premiere.fr)
En 1987, on revoit malgré tout Philippe Caroit au cinéma dans La rumba de Roger Hanin puis, en vedette aux côtés de Sophie Duez, dans In extremis d'Olivier Lorsac (un film depuis longtemps tombé aux oubliettes de l'histoire du cinéma français). Depuis, Philippe Caroit n'a tourné qu'à peine une dizaine de longs métrages pour le grand écran dont Les savates du bon Dieu (1999) de Jean-Claude Brisseau (qui s'est donc souvenu de l'acteur), Je pense à vous (2006) de Pascal Bonitzer (qui avait coécrit le scénario de Liberty Belle) et... Les randonneurs à Saint-Tropez (2007) de Philippe Harel. Certainement un clin d’œil et un hommage à sa prestation dans Deux enfoirés à Saint-Tropez !
Ajoutons que Deux enfoirés à Saint-Tropez a porté chance à Philippe Caroit sur le plan personnel. Puisque c'est sur ce tournage qu'il rencontra celle qui deviendra sa compagne jusqu'en 2008, l'ex-animatrice TV et actrice Caroline Tresca en l'occurrence, également à l'affiche du film de Max Pecas.
Marie Daëms
Encore un dernier mot sur Marie Daëms, qui joue la tante riche à millions dans Deux enfoirés à Saint-Tropez. Née en 1928, l'actrice succéda à Jacqueline Porel (voir Les surprises d'une nuit de noces) dans le cœur de François Périer. Marie Daëms et le grand acteur furent mariés à la ville entre 1949 et 1959. On vit d'ailleurs les deux tourtereaux ensemble dans de nombreux films populaires des années 50 aujourd'hui bien oubliés comme Au p'tit zouave (Grangier, 1950), Mon phoque et elles (Billon, 1951), L'amour, Madame (Grangier, 1952), Un trésor de femme (Stelli, 1953), Scènes de ménage (Berthomieu, 1954) ou Charmants garçons (H. Decoin, 1957).
Après 1963, Marie Daëms mettra quasiment un terme à sa carrière cinématographique. Dans les années 90, on l'apercevra encore dans Un week-end sur deux (N. Garcia, 1990), dans Ceux qui m'aiment prendront le train (Chéreau, 1998) (elle y joue Lucie, qui s'autoproclame "l'amour impossible" du défunt) et dans Le créateur (Dupontel, 1999).
Marie Daëms et Vincent Perez dans Ceux qui m'aiment prendront le train (Chéreau, 1998) (image : www.toutlecine.com)