Le Film du jour n°111 : À Las Vegas, on l'appelle Banco
Titre original : Heat
Un film de Jerry JAMESON et Dick RICHARDS (1986) avec Burt Reynolds, Karen Young, Peter MacNicol, Diana Scarwid, Howard Hesseman...
Au milieu des années 80, la carrière cinématographique de Burt Reynolds, sexe-symbole des années 70 qui faisait se pâmer les dames avec sa grosse moustache et son torse velu (voir photo ci-dessous), marque le pas. L'acteur tente alors de relancer la machine à biffetons avec Heat, baptisé stupidement en français A Las Vegas, on l'appelle Banco...
L'acteur de Délivrance pense avoir plusieurs atouts dans sa manche. Premier atout : le scénario, signé par l'écrivain William Goldman déjà détenteur de deux Oscar, l'un pour Butch Cassidy et Billy le Kid (Roy Hill, 1969) et l'autre pour Les hommes du président (Pakula, 1976). Deuxième atout : le réalisateur pressenti, Robert Altman, fort d'une Palme d'or à Cannes (MASH, 1970) et responsable de plusieurs films aux succès critiques et publics (Nashville, 1975 ; Un mariage, 1978).
De la peau de bête ou de la poitrine de Burt, laquelle est la plus velue ?
Malheureusement, Altman quitte le navire suite à une altercation avec le producteur et le film se retrouve dans les mains de Dick Richards (Il était une fois... la Légion, 1976, avec Terence Hill). Ce dernier est à son tour viré par Burt Reynolds en milieu de tournage, et le film tombe finalement dans la besace du tâcheron Jerry Jameson (Les naufragés du 747, 1977 ; Renflouez le Titanic, 1980).
Et ce qui devait arriver arriva : Heat est un échec et Burt Reynolds devra attendre dix années supplémentaires pour revenir à la mode et se défaire de sa réputation de has been. Et ce grâce à son rôle de réalisateur de bandes pornos dans le génial Boogie Nights (Paul Thomas Anderson, 1997), inspiré de la vie de l'acteur du X John Holmes.
Burt Reynolds et sa moustache dans À Las Vegas, on l'appelle Banco (image : www.toutlecine.com)
A noter que deux autres longs métrages célèbres portent le titre Heat : le film underground de 1972 signé par Paul Morrissey avec Joe Dallesandro, et le film de 1995 réalisé par Michael Mann où s'opposent deux monstres du grand écran, Al Pacino et Robert de Niro.
À Las Vegas, on l'appelle Banco, l'histoire : Nick est garde du corps et travaille pour son propre compte. Il accepte de partir à la recherche de l'agresseur de son ex-petite amie, Holly, violée par un inconnu. Avec l'aide d'un jeune millionnaire qui passait par là, il démasque le violeur qui s'avère être un dangereux sadique. Au terme d'une infernale poursuite (dixit la pub...) dans les entrepôts de Las Vegas, Nick élimine le scélérat et sa bande. Il peut à présent se rendre à Venise, la ville qui l'a toujours fait rêver (ah, l'amooouuuur, toujours l'amooouuuur...). C'est qu'il a le cœur tendre, Nick, derrière la moquette qui couvre ses pectoraux avantageux...
Burt Reynolds... sans sa moustache
Né en 1936 d'un père cherokee et d'une mère italienne, Burt Reynolds est taillé pour une carrière de footballeur américain professionnel. Mais celle-ci tourne court suite à un grave accident de voiture. Il se réoriente alors vers la télévision et participe à de nombreuses séries, essentiellement des westerns où son faciès de sang-mêlé fait merveille.
Ses premières apparitions au cinéma datent du tout début des années 60 et notre homme, histoire de ne pas perdre la main, s'illustre dans des... westerns comme Navajo Joe (S. Corbucci, 1966), où il interprète le rôle-titre, et Les cent fusils (Gries, 1969), où il partage l'affiche avec l'acteur black Jim Brown et la fameuse Raquel Welch.
Burt Reynolds dans Délivrance (Boorman, 1972) (image : www.toutlecine.com)
Burt Reynolds accède véritablement au statut de vedette avec Délivrance (1972) de John Boorman, film qui raconte les mésaventures de quatre amis partis descendre une rivière dans un coin perdu des États-Unis. Impressionnant en homme fort du groupe, il va alors se voir confier des rôles de machos.
Fort en gueule, jouant des biscotos et tombant les filles en claquant des doigts, tel est son portrait dans Le fauve (Kulik, 1973) et Plein la gueule (Aldrich, 1974). Cours après moi, shérif (Needham, 1977), où il joue un pilote automobile peu soucieux des limitations de vitesse, lui porte chance. Il devient une méga-star outre-Atlantique, statut qui sera confirmé par Tu fais pas le poids, shérif (Needham, 1979), prolongation du film précédent, et par L'équipée du Cannonball (Needham, 1980), où il fait mumuse avec Roger Moore, Farrah Fawcett et Dean Martin.
Burt Reynolds et Farrah Fawcett dans L'équipée du Cannonball (Needham, 1980)
Parallèlement, il tourne avec des réalisateurs américains cotés, comme Peter Bogdanovitch (Nickelodeon, 1976), Alan J. Pakula (Merci d'avoir été ma femme, 1979) ou Don Siegel (Le lion sort ses griffes, 1980).
Burt Reynolds, qui avait créé en 1975 une société de production avec Robert Aldrich (la RoBurt) - société qui avait cofinancé La cité des dangers (Aldrich, 1975) avec Catherine Deneuve et notre moustachu (sans moustache toutefois ici) -, passe lui-même derrière la caméra en 1976 avec Gator, un bon film d'action.
Il signera aussi Suicidez-moi docteur (1978), description burlesque des tentatives de suicide d'un homme qui se sait atteint d'une maladie incurable, puis deux thrillers : L'antigang (1982) et Le justicier de Miami (1985). Ces deux derniers films contribuent malheureusement à l'enfermer dans des rôles monolithiques et c'est à ce moment-là que sa carrière au cinéma se met à décliner...
Burt Reynolds a rangé sa moustache pour serrer sur son cœur Catherine Deneuve dans La cité des dangers (Aldrich, 1975)
Un déclin confirmé par ses prestations répétées de flics ou de détectives privés violents : Haut les flingues ! (Benjamin, 1985), où il forme un tandem avec Clint Eastwood, Malone/Un flic en enfer (Cokliss, 1987) avec la sublime Lauren Hutton, Preuve à l'appui (Crichton, 1989), etc.
Ses tentatives de se diversifier dans la comédie ne sont guère convaincantes, que ce soit dans La cage aux poules (Higgins, 1983) avec la tonitruante chanteuse country Dolly Parton, dans L'homme à femmes (Edwards, 1983), remake américain de L'homme qui aimait les femmes de Truffaut, ou dans Scoop (Kotcheff, 1987) avec Kathleen Turner, elle aussi future has been.
Mark Wahlberg et Burt Reynolds dans Boogie Nights (Anderson, 1997) (image : www.toutlecine.com)
La carrière de Burt Reynolds semble trouver un second souffle avec Boogie Nights en 1997, film où sa prestation est saluée par toute la critique internationale.
Notre moustachu, aujourd'hui classé par les artistes hollywoodiens les plus mal liftés (!), ne semble pas, toutefois, avoir réussi à réellement rebondir. La plupart des films dans lesquels il a joué ces dix dernières années n'ont d'ailleurs guère atteint les rivages français, à l'exception du nullissime Driven (Harlin, 2001), de Jusqu'au cou (Brill, 2004) où sa participation fait référence à son rôle dans Délivrance, de Mi-temps au mitard (Segal, 2005), remake de Plein la gueule, et de Shérif, fais-moi peur (Chandrasekhar, 2005), où sa prestation relève plutôt du clin d’œil à ses films des années 70.
On l'a vu également dans King Rising : au nom du roi (Boll, 2007), film avec Jason Statham en vedette, mais on ne peut guère considérer ce film sorti directement en DVD dans nos contrées comme une référence... Bref, Burt Reynolds, à désormais plus de 70 ans, vit maintenant sur ses acquis...
Burt Reynolds a désormais le visage tiré à quatre épingles grâce à son chirurgien esthétique
Amateurs de potins, sachez que Burt Reynolds a été marié à deux actrices TV, l'une britannique (Judy Carne de 1963 à 1965) et l'autre américaine (Loni Anderson de 1988 à 1993). Il a aussi entretenu une longue passion amoureuse avec l'actrice Sally Field, Oscar de la meilleure actrice et prix d'interprétation féminine à Cannes pour son rôle dans Norma Rae (1979) de Martin Ritt.
Burt Reynolds est décédé le 6 septembre 2018.