Le Film du jour n°109 : Le jour se lève et les conneries commencent
Un film français de Claude MULOT (1981) avec Gérard Surugue, François Domange, Gérard Darrier, Eva Harling, Maurice Risch, Jacques Legras, Arlette Didier, Robert Rollis, Henry Guibet...
C'est exactement ce que je me dis à l'aube d'une nouvelle journée après une discussion avec certains de mes voisins... Mais non, c'est une blague, évidemment. Car mes voisins sont tous formidables ! Comme le sont tous les acteurs ayant participé à ce fabuleux film intitulé poétiquement Le jour se lève et les conneries commencent...
A noter, dans cette bande somme toute assez minable, une petite participation de Johnny Hallyday (vérifiez, son nom est sur l'affiche...) et la présence d'une dénommée Valérie Chérès... qui n'est autre que Valérie Kaprisky ! La jeune fille éclatera à l'écran un an plus tard aux côtés de Richard Gere dans A bout de souffle made in USA (McBride) et sera immortalisée en 1984 par Andrzej Zulawski dans La femme publique. On a revu récemment l'actrice, aujourd'hui rhabillée et rentrée dans le rang, dans Le cœur des hommes 2 (Esposito, 2007), Envoyés très spéciaux (Auburtin, 2008) et Tricheuse (Davy, 2008).
Trois ans avant La femme publique (Zulawski, 1984), film qui la dévoila (dans tous les sens du terme), Valérie Kaprisky était apparue dans Le jour se lève et les conneries commencent... (image : www.toutlecine.com)
Le jour se lève et les conneries commencent, l'histoire : Le film nous conte les aventures de trois copains inséparables d'une trentaine d'années liés par une même aversion du travail et engagés dans une quête irrépressible des plaisirs. Ils vivent tous les trois aux crochets de leur famille et/ou de leur petite amie. Ensemble, les trois joyeux drilles imaginent et réalisent les pires âneries. Et ça les fait rire ! D'ailleurs, ça ne fait rire qu'eux, car le public, dans la salle, est consterné par tant de médiocrité à tous les niveaux !
Né en 1942 et décédé par noyade en 1987, Claude Mulot n'est pas passé à la postérité grâce au Jour se lève et les conneries commencent... Loin s'en faut ! Non, ce monsieur a acquis sa réputation avec un film porno, considéré comme un chef-d’œuvre dans son genre : Le sexe qui parle (1975). Un programme alléchant... qui n'est toutefois pas sans rappeler un "concept" déjà exposé par Diderot dans "Les bijoux indiscrets".
Mais attention ! Claude Mulot a signé Le sexe qui parle - ainsi que tous ses autres films X - sous le pseudonyme de Frédéric Lansac, plus passe-partout que son vrai patronyme. A ce sujet, c'est dingue le nombre de réalisateurs français du cinéma X qui ont également pondu, histoire peut-être de se refaire une virginité cinématographique, des films "comiques" sinistres ou des films "d'horreur" risibles, à ranger en général au rayon "bis". Outre Claude Mulot, entrent dans cette catégorie Jean Rollin (voir Ne prends pas les poulets pour des pigeons), Jean-Claude Roy (voir Les stripteaseuses ou ces femmes que l'on croit faciles), Michel Lemoine ou Gérard Kikoïne.
Claude Mulot est aussi connu pour être l'un des scénaristes attitrés de... Max Pecas, l'inoubliable réalisateur de Deux enfoirés à Saint-Tropez. Les deux hommes travaillèrent pour la première fois ensemble sur Je suis une nymphomane (1970) (on imagine sans mal les séances de brainstorming entre les deux compères sur un tel sujet...) et entamèrent une collaboration étroite à partir de Marche pas sur mes lacets (1977). Cette collaboration durera jusqu'en 1986 et donnera naissance à ces monuments du ciné franchouillard et nanardesque que sont Embraye bidasse, ça fume (1978), On est venu là pour s'éclater (1979), Mieux vaut être riche et bien portant que fauché et mal foutu (1980) et On se calme et on boit frais à Saint-Tropez (1986).
Le premier film réalisé par Claude Mulot (image : www.encyclocine.com)
Claude Mulot est passé lui-même à la réalisation dès 1968 en signant Sexyrella, sorti aussi sous le titre Bien faire et les séduire... Que dire de ce film ? Laissons la parole à Médiafilm, un organisme québécois tendance catho spécialisé dans la cotation des longs métrages : "La progression chaotique du film laisse vite deviner que le scénario n'est ici qu'un prétexte servant aux auteurs à exploiter les aspects érotiques du sujet. Ce qu'ils font d'ailleurs sans finesse aucune et sans même s'efforcer de conférer la moindre valeur artistique à leur entreprise. L'interprétation est assumée par des inconnus qui ne semblent pas avoir une notion bien précise de l'art dramatique. Une mince intrigue prétexte relie entre elles des scènes vulgaires d'exhibitionnisme".
Anny Duperey et Elisabeth Teissier pointent au générique de La rose écorchée (1960), deuxième film de Claude Mulot (image : www.cinema-francais.fr)
Après l'érotisme, Claude Mulot s'attaque un an plus tard au thriller horrifique en filmant un vague remake des Yeux sans visage de Georges Franju (1959). Nom du film : La rose écorchée (1969). Protagonistes : Philippe Lemaire (Frédéric Lansac dans le film, origine du pseudo du monsieur), Anny Duperey et... Elisabeth Teissier. Oui, oui, vous avez bien lu. C'est bien notre Madame Soleil des temps modernes qui, avant de frayer avec Mitterrand et de boucler en 2001 une thèse intitulée « Situation épistémologique de l'astrologie à travers l'ambivalence fascination-rejet dans les sociétés postmodernes » (ça vous pose un personnage, ça...), s'est essayée au cinéma entre 1965 et 1975.
Le chanteur Pierre Vassiliu est apparu par trois fois au cinéma et notamment dans La saignée (1971) de Claude Mulot (image : www.cinema-francais.fr)
Dans la filmographie de Claude Mulot, La rose écorchée sera suivie de La saignée (1971), sorte de thriller au casting totalement improbable. Au générique figurent notamment Gabriele Tinti, compagnon dans la vie de Laura Gemser, la fameuse Emanuelle "avec un M" au cinéma (faut pas confondre avec Sylvia Kristel, alias Emmanuelle, hein ?), Patti d'Arbanville, actrice apparue pour la première fois dans Flesh (1968) d'Andy Warhol et Paul Morrissey, Sydney Chaplin, le fils de qui vous savez, et le chanteur Pierre Vassiliu.
A mettre également au compte de l'ami Mulot (à ne pas confondre avec l'amie Molette) un Profession : aventuriers (1972), avec Nathalie Delon et Curd Jürgens (rien à voir, on s'en doute, avec Profession : reporter (1975) d'Antonioni...) et le film comique à tendance sociologique C'est jeune et ça sait tout, connu aussi sous le titre Y a pas de mal à se faire du bien (1974). A l’œuvre là-dedans : Jean Lefebvre, Michel Galabru et Darry Cowl, que du lourd !
Encore un film "comique" à mettre au compte de Claude Mulot
Après sa période X, qui s'étend grosso modo de 1974 à 1981, Claude Mulot reviendra au cinéma traditionnel avec Le jour se lève et les conneries commencent... et Le couteau sous la gorge (1986), son œuvre ultime.
Présenté comme un giallo dans la grande tradition des films de Dario Argento (hum... passons...), ce dernier long métrage relate les aventures d'un jeune mannequin qui vit une véritable psychose. Traquée par un tueur (ce qui ne l'empêche de se mettre les seins à l'air plus souvent qu'à son tour), elle voit les membres de son entourage disparaître les uns après les autres. La phrase placée en exergue du titre donne le ton d'emblée : "Quand l'angoisse s'achève, la terreur commence...". Ça, c'est du grand art ! Ah, j'oubliais, notre Brigitte Lahaie nationale figure au générique dans un rôle "convenable"...
Le dernier film réalisé par Claude Mulot, un an avant son décès par noyade