Le Film du jour n°104 : Les stripteaseuses, ces femmes que l'on croit faciles

Publié le par lefilmdujour

Un film français de Jean-Claude ROY (1964) avec Sabine Sun, Sophia Laure, Loulou Guiness, Claude Beauclair, Marc Lamole, Roger Trapp...

Quelles sont les scènes de striptease les plus appréciées au cinéma ? Voilà une question qu'elle est bonne, me direz-vous. Selon un sondage publié sur le site américain current.com il y quelques années, c'est le striptease de Jamie Lee Curtis devant un Schwarzy éberlué dans True Lies (Cameron, 1994) qui remporte le pompon. A ce niveau, c'est du "désapage" élevé au rang d'art !

Vient ensuite l'effeuillage inoubliable de Kim Basinger face à un frigo ouvert dans 9 semaines et demie (Lyne, 1985), puis celui de Salma Hayek dans Une nuit en enfer (Rodriguez, 1996). Les petits libidineux seront heureux de savoir que le striptease d'Elisha Cuthbert dans The Girl Next Door (Greenfield, 2004) et celui de Natalie Portman dans Closer (Nichols, 2006) arrivent respectivement en quatrième et cinquième positions.

Jamie Lee Curtis débute sa séance d'effeuillage dans True Lies (Cameron, 1994) (image : www.linternaute.com)

Il va sans dire que les votants sont essentiellement nord-américains, car comment oublier la mise à nu d'une Alice Sapritch égrillarde dans La folie des grandeurs (Oury, 1971) ou celle d'une Sophia Loren quasiment grabataire (non, je suis méchant, là...) dans Prêt-à-porter (Altman, 1994) ?

Les stripteaseuses ou ces femmes que l'on croit faciles, l'histoire : Tout est dans le titre. Sorte de docu-fiction, le film se veut une enquête - sérieuse, il va sans dire - sur le milieu du striptease, avec interviews de différents protagonistes et de gens de la rue (dont Madame Michu et Papy Brossard...).

Vous serez - j'en suis sûr - heureux d'apprendre que la fameuse Loulou Guiness, pointant au générique du film d'aujourd'hui, fut une danseuse du Crazy Horse dans les années 50 et qu'elle joua aussi les effeuilleuses dans Mademoiselle Strip-tease (Foucaud, 1957).

Quant à Sabine Sun, née en 1940 à Antibes, on la vit dans de nombreux films de Terence Young (réalisateur qui signa les trois premiers James Bond avec Sean Connery). Et pour cause : c'était sa petite copine ! Ayant partagé la vie du metteur en scène britannique jusqu'à la mort de ce dernier en 1994, elle apparaît dans De la part des copains (1970) avec Charles Bronson et Liv Ullman, dans Cosa Nostra (1972) avec Charles Bronson encore et Lino Ventura, et dans Les Amazones (1973), film dans lequel les femmes avec soutif ne sont pas forcément les bienvenues...

Sabine Sun entre Peter O'Toole et Howard Vernon dans Quoi de neuf Pussycat ? (Donner, 1965)

Auparavant, Sabine Sun avait montré sa frimousse (et pas seulement sa frimousse d'ailleurs) dans des films un peu lestes comme Désirella (1970) du désormais célébrissime Jean-Claude Dague (voir Poussez pas grand-père dans les cactus), Les belles au bois dormantes (Chenal, 1970), Trois filles vers le soleil (Baumont, 1969) ou Hallucinations sadiques (ça, au moins, c'est un titre alléchant !) (Bastid, 1968).

Le cinéphile compulsif, accessoirement porté sur les starlettes sexy, l'aura aussi repérée dans des petits films d'espionnage comme Coplan ouvre le feu à Mexico (Freda, 1967), dans un western-spaghetti signé Franz Kramer alias Gian Carlo Parolini (Sartana, 1968), ou dans des bandes policières teutonnes comme Commissaire X traque les chiens verts (Kramer, 1966).

Sabine Sun en tête d'affiche dans ce petit film d'espionnage signé Riccardo Freda

Jean-Claude Roy, le réalisateur de ces Stripteaseuses, est surtout connu sous son pseudonyme, Patrick Aubin. C'est en effet sous ce nom qu'il a signé (dixit les spécialistes dont je ne fais évidemment pas partie) les meilleurs films pornos de la fin des années 70 et du début des années 80 (Langue de velours, Les zizis en folie, Maîtresse pour couple, Les après-midi d'une bourgeoise en chaleur, etc.). Avant cette période passablement débridée, Jean-Claude Roy, né en 1933 et décédé en 2018, fut un digne représentant d'un certain cinéma populaire français et toucha à différents genres comme la comédie, l'érotisme et le polar.

L'homme passa à la réalisation dès les années 50 avec des films dits "de cabaret", comme Un printemps à Paris (1957), où défilent des célébrités de l'époque (Charles Trenet, Zappy Max, Jean Tissier) ou Une nuit au Moulin-Rouge (1958), avec la magnifique Tilda Thamar (vue aussi dans Le chanteur de Mexico aux côtés de Luis Mariano et dans Les prédateurs de la nuit de l'inénarrable Jesus Franco).

Du cabaret à l'érotisme "sociologique", il n'y a qu'un pas, et Jean-Claude Roy le franchit sans états d'âme en 1964 avec Les stripteaseuses. Viendront ensuite Dossier Prostitution (1969) et La mafia du plaisir (1970) (sur les parties fines de la Côte d'Azur). Il signe aussi à la même époque une adaptation des Petites filles modèles de la comtesse de Ségur, avec d'anciennes gloires, comme Michèle Girardon - une demoiselle aperçue au cinéma chez Bunuel (La mort en ce jardin, 1956) et Rohmer (Le signe du lion, 1959) ainsi qu'à la TV dans Les chevaliers du ciel -, ou Bella Darvi (inoubliable dans L’Égyptien de Michael Curtiz, 1954).

Un film érotico-soft de Jean-Claude Roy réalisé en 1982 avec Jean-Claude Dreyfus (!)

Côté comédies, en général pas très finaudes, on doit à Jean-Claude Roy un sketch des Combinards (1964) avec Darry Cowl et Michel Serrault, ainsi qu'un nanar atroce avec Paul Préboist : Y a-t-il un pirate sur l'antenne ? (1983). Ses polars ont mieux résisté au temps. C'est le cas de L'insolent (1972). Le rôle principal y est interprété par Henry Silva, l'une des "gueules" les plus célèbres des films de gangsters américains.

L'insolent fut d'ailleurs récemment projeté à la Cinémathèque française dans le cadre d'un double programme, les heureux spectateurs ayant pu se rincer l’œil dans la foulée avec Éducation anglaise (1982), film érotique soft avec Brigitte Lahaie et Jean-Claude Dreyfus (un collectionneur de cochon(ne)s, comme chacun sait...). "Éducation anglaise replonge dans la France des années 30, ses rigides pensionnats de jeunes filles, son ébullition politique, pour inventer une fable morale et perverse... comme si l'âge d'or du sexe explicite devait, en toute logique, réinventer un érotisme à la fois dérisoire et cérébral, cynique et allusif", pouvait-on lire sur le programme de la Cinémathèque. Trop fort !

Un nanar signé en 1983 par Jean-Claude Roy, connu aussi sous le titre Y a-t-il un pirate sur l'antenne ?

Le dernier film à ce jour de Jean-Claude Roy est un petit polar de série B assez improbable, intitulé Massacres (1991) et sous-titré "Dans l'enfer des snuff movies !"... Principaux protagonistes : Charley Boorman (fils du réalisateur du même nom), Pierre Clémenti et Takashi Kawahara, acteur nippon comme son patronyme l'indique, à l'aise aussi bien chez Manoel de Oliveira - Le soulier de satin, 1985 - que chez Claude Zidi - La zizanie, 1978 -. En un mot : formidable !

Publié dans Titres étranges

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