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La rubrique d'Anna le Gésic : Edward II
Publié le
par lefilmdujour
Derek Jarman, 1991
Adapté de la pièce de théâtre éponyme du dramaturge élisabéthain Christopher Marlowe, Edward II ressuscite un pan de l'histoire anglaise du XIVe siècle dont les fans de la série TV "Les Rois maudits" se souviennent certainement. Disons, en résumé, que la pièce raconte comment le roi d'Angleterre Edward II, marié à la fille du roi de France Philippe IV le Bel mais raide dingue d'un monsieur, le beau Pierre Gaveston en l'occurrence, se retrouve en butte à la vindicte de son épouse et des pairs du royaume, avant d'être destitué, emprisonné et occis d'une triste façon (puni par où il avait péché, disent les mauvaises langues, avec un fer rouge enfoncé dans son royal croupion).
Le film ne raconte pas autre chose. Mais c'est Derek Jarman, déjà auteur quinze ans plus tôt d'un Martyre de Saint-Sébastien plutôt sulfureux, qui est à la mise en scène. Nous sommes donc très loin du film d'époque. Le réalisateur projette dans son œuvre ses obsessions homo-érotiques (Edward II s'ouvre sur une scène particulièrement chaude entre deux marins) et son militantisme envers les droits des homosexuels. Dès lors, l'action se retrouve transposée dans un XXe siècle en proie à une répression de type thatchérien. Un XXe siècle présent essentiellement à travers les accessoires et les costumes puisque toute l'action est filmée (admirablement il faut bien le dire) dans un décor nu quasi unique.
Cette approche théâtrale et contemporaine un brin esthétisante fonctionne étonnamment bien, soutenue de la tête et des épaules par des acteurs hors pair. Steven Waddington, qui joue Edward II et que l'on peut retrouver aujourd'hui en duc de Buckingham dans la série "Les Tudor",Nigel Terry, qui interprète Mortimer, l'âme damnée de la reine, et qui fut le roi Arthur dix ans plus tôt dans l'Excalibur de John Boorman, et la divine Tilda Swinton, l'égérie de Jarman qui incarne avec élégance et machiavélisme Isabelle, sont dignes de tous les éloges. Le spectateur un tantinet mélomane reconnaîtra aussi Annie Lennox du groupe Eurythmics dans une magnifique interprétation de "Every time we say goodbye" de Cole Porter qui, rappelons-le, était homosexuel.