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La piqure de Sal Obscur : La toile d'araignée
Publié le
par lefilmdujour
Vincente Minnelli, 1955
La toile d’araignée, ou comment une banale histoire de rideaux déchaîne les émotions, les passions et les drames dans une clinique psychiatrique « libérale » où les malades vivent dans une relative liberté et où il est parfois bien difficile de déterminer qui, parmi les patients et les membres du personnel médical, est le plus fou ou le plus déviant.
La toile d’araignée est l’un des tout premiers grands drames réalisés par Vincente Minnelli après sa période « comédies musicales ». Dans la filmographie du metteur en scène, l’œuvre précède de peu La vie passionnée de Van Gogh, Thé et sympathie, Comme un torrent et Celui par qui le scandale arrive, tous marqués « par l’élégance de la mise en scène, des mouvements de caméra et des décors » (501 réalisateurs, collection Omnibus).
L’action de La toile d’araignée est quasiment circonscrite dans et autour d’une clinique psychiatrique dirigée par un docteur (Richard Widmark), totalement voué à sa profession et délaissant par là-même femme et enfants. Frustrée sexuellement, son épouse (Gloria Grahame, toujours excellente dans ce genre de rôle), se laisse courtiser par l’un des collègues de son mari (Charles Boyer), vieux beau dépassé professionnellement mais au pouvoir de nuisance encore bien réel. Le personnage interprété par Richard Widmark avoue, de son côté, un petit faible pour l’une de ses consœurs (Lauren Bacall) qui, après avoir perdu mari et enfant dans un accident, tente de soigner les patients (et elle-même) en développant leurs talents artistiques. La jeune femme a pris sous son aile un peintre tout juste sorti de l’adolescence, dépressif, violent et mal dans sa peau (John Kerr, un an avant Thé et sympathie). Le garçon est lui-même attiré par une jeune fille timide et agoraphobe (Susan Strasberg dans son premier rôle au cinéma).
Ce casting déjà haut de gamme est complété par Lilian Gish, star du muet et égérie de David W. Griffith, qui se voit confier le rôle de la trésorière de l’établissement, vieille fille aigrie, désespérée, mais garante du passé glorieux de la clinique. Autant dire que la situation est explosive ! Et c’est un détail de décorateur, en fait le motif des nouveaux rideaux à installer dans la bibliothèque de l’établissement (Vincente Minnelli a débuté comme décorateur), qui précipitera tout ce beau monde dans le drame.
Avec ce film où tous les personnages sont caractérisés autant par leurs névroses que par les décors dans lesquels ils vivent, Vincent Minnelli réussit le tour de force de créer une véritable œuvre chorale où chacun, à quasi-égalité, joue un rôle crucial et indispensable dans l’écheveau tissé de main de maître par le scénariste (John Paxton) et le réalisateur. La toile d’araignée est un spectacle réellement prenant pour ceux qui apprécient les tensions psychologiques et les drames inéluctables.
Les cinéphiles sourcilleux reconnaîtront dans un petit rôle (l’épouse du médecin interprété par Charles Boyer) Fay Wray, la jolie blonde hurlante du King Kong de 1933.