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La piqure de Sal Obscur : Fièvres
Publié le
par lefilmdujour
Jean Delannoy, 1941
Certes les films de Jean Delannoy n’ont pas bonne presse et difficile, effectivement, de trouver quelque intérêt dans les œuvres, justement vilipendées par les ténors de la Nouvelle Vague, que le réalisateur a livrées dans les années 50 et 60 (à l’exception notable des deux Maigret tournés avec Jean Gabin qui se laissent encore regarder avec plaisir). Mais la filmographie de Jean Delannoy recèle quand même quelques perles. Il faut toutefois remonter aux années 1940 pour les trouver, et Fièvres est justement l’une d’entre elles.
Bien sûr, il ne faut pas s’attendre à un chef-d’œuvre, ça se saurait, surtout que l’acteur principal se trouve être Tino Rossi… Et si l’homme s’avère un chanteur honnête (il n’aurait certainement pas rencontré un tel succès à l’époque si ce n’était pas le cas), tout le monde s’accorde à le trouver très mauvais acteur. Chantre de l’inexpressivité, de l’atonie et de l’œil éteint, Tino Rossi est assez épouvantable devant la caméra. Mais l’intérêt de Fièvres n’est pas là, ni dans le scénario d’ailleurs, qui frôle le mélo saint-sulpicien : marié à une femme dévouée souffrant d’une grave maladie qu'elle lui cache, un chanteur d’opéra – le Tino donc – cède aux charmes d’une mondaine au moment où son épouse expectore son dernier souffle… Notre ténor trouvera finalement la rédemption en entrant dans les ordres… Oui, racontée comme ça, l’histoire peut faire fuir.
C’est par le casting, que Fièvres est en réalité sauvé et digne d’être visionné. Le chanteur d’opéra est en effet flanqué d’un imprésario fantaisiste joué par l’excellent Jacques Louvigny, dont les mimiques irrésistibles et les tirades parfois hilarantes hissent le film vers la comédie de mœurs et lui évitent de sombrer dans le pathos le plus indigeste. Les actrices participent également au charme de Fièvres. La belle Madeleine Sologne, qui joue l’épouse, sera immortalisée quelques mois plus tard face à Jean Marais dans L’éternel retour. Jacqueline Delubac, surtout vue chez Sacha Guitry (normal c’était son épouse), fait feu de toute sa personnalité piquante. Et Ginette Leclerc, en jeune garce au grand cœur, crève une fois de plus l’écran. Un trio de choc qui complète agréablement le tableau. Cerise sur le gâteau : les fans de Tino Rossi (mais en reste-t-il encore ?) entendront leur idole chanter, fort bien ma foi, une jolie version de l’Ave Maria de Schubert. Mais on est en droit de ne pas aimer…
Sal Obscur
Fièvres est disponible en DVD chez René Chateau Vidéo