Chantal Akerman (1950-2015)

Publié le par lefilmdujour

Considérée par certains – à juste titre – comme la réalisatrice européenne la plus importante des années 1970 et 1980, la cinéaste belge Chantal Akerman, unanimement reconnue pour Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles (1975), avec Delphine Seyrig dans le rôle-titre, s’est donné la mort le 5 octobre 2015 à l’âge de 65 ans.

Après des études de cinéma à Bruxelles, enthousiasmée par les films de Jean-Luc Godard, elle réalise son premier court métrage à l’âge de 18 ans, Saute ma ville (1968), et part pour New York où elle découvre le cinéma expérimental américain, notamment à travers les œuvres de Jonas Mekas, Andy Warhol ou Michael Snow, qui influenceront ses premiers longs métrages.

Après Hôtel Monterey (1972), documentaire muet sur les habitants d’un hôtel pour nécessiteux, elle signe Je, tu, il, elle (1974) où elle se met en scène aux côtés de Niels Arestrup en jeune femme acceptant difficilement le passage à l’âge adulte dans un film au jeu érotisé. Puis, avec Jeanne Dielman, elle réalise son œuvre la plus ambitieuse, brûlot féministe et chronique de la vie d’une femme de la petite bourgeoisie, prostituée occasionnelle, où se remarque un soin quasi obsessionnel du détail.

Le film, d’une durée de 3h20, est une description méticuleuse de l’aliénation, en illusion de temps réel. « Chantal Akerman veut un cinéma direct, un cinéma-vérité qui dépasse même la réalité et recrée le romanesque, ainsi les gestes de Jeanne Dielman dans sa cuisine », écrit Jean Tulard dans son Dictionnaire du cinéma.

La réalisatrice retrouve Delphine Seyrig dans Golden Eighties (1986), comédie musicale (et pessimiste) avec aussi Myriam Boyer, Lio, Fanny Cottençon et Charles Denner (certains se souviennent d’un sorte de ballet chanté par des shampouineuses, assez déjanté pour l’époque…). L’audace de Chantal Akerman se retrouve aussi dans Les Rendez-vous d’Anna (1978) avec Aurore Clément, qui retrace de façon minimaliste le parcours d’une jeune réalisatrice à travers l’Europe.

Dans les années 1990 et 2000, la cinéaste, tout en continuant à produire des documentaires caractérisés par une recherche plastique et formelle et une écoute humaniste (D’Est, 1993, Sud, 1998, De l’autre côté, 2003), réalise des films plus accessibles comme Un divan à New York (1995) avec Juliette Binoche et John Hurt, La Captive (2000), adaptation de La Prisonnière, le volet d’A la recherche du temps perdu de Proust, avec Sylvie Testud et Stanislas Merhar, Demain on déménage (2003) avec Aurore Clément, Sylvie Testud et Jean-Pierre Marielle, ou La Folie Almayer (2011), adaptation d’une œuvre de Joseph Conrad. Son dernier film, No Home Movie (2015), dont la sortie est prévue prochainement en France, a été présenté en compétition au dernier Festival de Locarno en août.

Publié dans Claps de fin

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